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Domaine de Castelnau

De Triple Performance
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Exploitation viticole de qualité associée à des grandes cultures
Christophe Muret, Béatrice Muret
Institut Agro Montpellier Hérault (département) Viticulture, Grandes cultures

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A Castelnau-de-Guers, dans l’Hérault (34), Christophe Muret est un entrepreneur individuel gérant le domaine viticole de Castelnau avec sa femme Béatrice Muret. Leur exploitation se répartit sur 1 950 ha dont 1 730 ha de grandes cultures et 220 ha de vignes. L’exploitation met en place la pratique du semis direct ainsi que le label HVE 4[1] le but étant de réduire le temps de travail pour semer ses cultures et de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires.


Contexte

  • Nom : Christophe Muret
  • Localisation : Castelnau-le-Guers, Hérault (34)
  • Productions : Viticulture et grandes cultures
  • SAU : 1 950 ha
  • UTH : 8 UTH
  • Cultures : Blé tendre, pois, orge, avoine, colza et vigne.
  • Label : IGP OC (Indication Géographique Protégée Origine Contrôlée), IGP Pays de l’Hérault ou AOP (Appellation d'Origine Contrôlée) Picpoul de Pinet et Languedoc.
  • Type de sol :
    • Sol argilo-calcaire. ⅓ des terres sont des terres rouges de Garrigues arides où sont les Picpoul de Pinet, ⅔ sont des alluvions de l’Hérault (sol profond).
    • pH : basique.
    • Taux de matière organique : > 2,5 %.
    • Bon rapport bactérie-champignon. Présence de vers de terre qui assurent une porosité verticale.
  • Climat : Méditerranéen avec des hivers plutôt doux
  • Modes de commercialisation : Vente directe (Café Hôtel Restaurant), export, grande distribution

Historique

  • Christophe est fils d’agriculteurs. L’exploitation de ses parents était spécialisée en culture légumière et arboricole (abricot, pêche, pomme, prune, kiwi, melon, tomate, asperge) avec quelques céréales (tournesol, maïs semence et blé). Après un bac technologique agricole, Christophe y travaille comme technicien agricole. Il a continué à se former notamment en lisant de nombreuses revues agricoles telles que La France Agricole ou Agri-Cool.
  • 1997 : Christophe achète et s’installe sur le domaine de Castelnau avec sa femme Béatrice hors de l’exploitation familiale. Ils ont 100 ha d’exploitation avec 45 ha de céréales, 47 ha de vignes et le reste en culture légumière (tomate, melon).
  • 2009 : Le père de Christophe quitte l’exploitation et part à la retraite. Christophe reprend les terres biterroises de son père : 500 ha (250 ha de céréales, 80 ha de melon, 120 ha de tomates et 50 ha répartis en 4 jachères ), qu’il convertit en parcelles de blé dur.
  • 2012 : Mise en place du semis direct
  • 2018 : Intégration de la démarche HVE 4 (Haute Valeur Environnementale)
  • 2024 : Après la location de plusieurs nouvelles parcelles, l’exploitation atteint 100 ha de vigne à Béziers, 120 ha de vigne à Castelnau, 1 500 ha de céréales et 250 ha de jachères répartis entre Castelnau et Bézier.
  • Importance atelier : Les bouteilles commercialisées correspondent au chiffre d’affaire principal.


Spécificités

Le Domaine de Castelnau est une exploitation avec une SAU importante (1 750 ha de grandes cultures et 220 ha de vignes). Christophe et Béatrice disposent d’une cave de vinification moderne avec des cuves en inox et vendent dans le caveau sur site.


Motivations et objectifs

L’un des objectifs principaux de Christophe à travers la certification HVE est de réduire l’utilisation de produits phytosanitaires, notamment ceux qui peuvent être cancérigènes. Il ne veut pas exposer ses employés à des risques trop élevés et souhaite protéger ses sols. La diminution de produits phytosanitaires permet également de diminuer les coûts des charges.

Quant au semis direct, cette pratique permet de préserver ses sols et de limiter le passage des tracteurs pour le travail du sol, ce qui économise aussi du gasoil et du temps de travail.


Étapes de transition

  • 1997 : Début de l’entreprise
  • 2009 : Reprise des terres du père
  • 2012 : Mise en place du semis direct
  • 2015 : Maîtrise du semis direct
  • 2018 : Intégration de la démarche HVE 3
  • 2023 : Intégration de la démarche HVE 4 avec la nouvelle réforme de la PAC (Politique Agricole Commune)


Descriptif du système actuel

L’exploitation fonctionne avec 8 UTH permanents et 6 saisonniers qui viennent pour la taille de la vigne.

Assolement actuel

  • 220 ha de vignes
  • 1 000 ha de blé tendre
  • 350 ha de pois
  • 150 ha d’orge
  • 100 ha de colza
  • 50 ha d’avoine
  • 80 ha de jachère


Vignes

Chardonnay du Domaine
  • Indices de qualité : AOP Picpoul de Pinet Blanc, AOP Languedoc, IGP Pays d’Oc, IGP Pays d’Hérault
  • Âge des vignes : De 1 à 35 ans, quelques vignes à 60 ans
  • Fournisseurs plants : Vivai Cooperativi Rauscedo (coopérative italienne)
  • Densité de plantation : 2,25 m x 0,9 m soit environ 5000 ceps/ha
  • Rendement moyen : 70 hL/ha
  • A la plantation : Passage décompacteur à 70-80 cm
  • Taille : A partir du 15 novembre, quand le repos végétatif a bien commencé, après la descente de sève
  • Hiver : Pâturage par un troupeau de 1 200 moutons. Déplacements par filets mobiles. Les moutons restent environ 2 jours sur 3 ha.
  • Printemps - été : Tontes du couvert spontané
  • Fumure en mars :
    • Fumure chimique si manque de trésorerie : 45 N, 15 P, 20 K
    • Fumure organique si trésorerie suffisante : 30 N, 20 P, 30 K
    • Ajout de soufre pour baisser le pH et pour avoir des vignes moins carencées
  • Protection des vignes :
    • Anti-mildiou et anti-oïdium
    • De mai à début août
    • 6 traitements dont les premiers sont à dose partielle : 1er traitement à 50%, 2ème traitement à 70%, 3ème traitement à 80% => les 3 premiers traitements sont l’équivalent de 2
    • Fournisseur : PERIS
  • Irrigation :
    • Goutte-à-goutte
    • Irrigation (Réseau Hydraulique Régional) en juillet et de février à avril si pas de pluie pendant l’hiver (Christophe a constaté que le départ de la végétation était meilleur si les vignes avaient un stock d’eau)
    • 3 à 4 tours d’irrigation de 24 heures à 0,7 mm/h en juillet (3 semaines)
    • Christophe prend la décision d’irriguer selon la météo passée et la météo à venir.
Vigne du Domaine (février 2025)


Grandes cultures

La rotation type des grandes cultures est : colza - pois - blé. Christophe ne fait pas plus de 2 années consécutives de la même culture pour éviter les maladies.

L’entièreté des grandes cultures est semée en semis direct. Christophe sème sur le couvert spontané qui pousse.

Parcelle de pois semée en semis direct (février 2025)
  • Gestion du couvert : Le couvert spontané est détruit par voie chimique avant semis direct.
  • Résidus de culture :
    • Colza, pois et avoine sont laissés au sol
    • Blé et orge : Christophe retire la menue paille car elle est trop difficile à dégrader
  • Irrigation : Pas de système d’irrigation, la pluviométrie assure l’apport d’eau suffisant puisque le rendement associé convient à Christophe.
  • Fertilisation :
    • Urée enrobée : Christophe apporte de l’urée enrobée de l’ordre de 120 unités d’azote pour le blé tendre (ordre donné : 3 unités d’azote pour 1 quintal de blé tendre). L’enrobage permet le ralentissement de la dégradation de l’urée, cela empêche sa volatilisation sous forme N2.
    • FertiSure : Retardateur de dénitrification biologique
  • Protection : Application d’un seul fongicide par an
  • Ravageurs : Le zabre est un coléoptère[2] s’attaquant aux graminées dont les dégâts sont plus importants lorsque les céréales sont jeunes avec une disparition totale des plantes. Christophe a également des problèmes de mulots sur petits pois et de limaces sur le colza.
    • Moyen de lutte : En théorie, le semis devrait être avancé pour permettre à la plante d’être plus robuste et de résister naturellement contre les zabres (éclosion des œufs en septembre). Christophe, étant dans les vignes jusque-là, choisit de retarder la date de semis. Application d'anti limace.


Pratiques innovantes

  • Semis direct : Christophe a commencé le semis direct il y a 12 ans, soit en 2012. Il a testé plusieurs semoirs : semoirs à disques (Semeato, Amazone) et un semoir à dents (Väderstad). Le but de cette pratique est de trouver le moyen de semer de manière efficiente, c’est-à-dire de trouver le bon rapport entre l’argent dépensé et la récolte. Par simplicité et efficacité, Christophe a choisi un semoir à disques (Horsch Avatar, x2 en 12m) car il roule et ne bourre pas contrairement au semoir à dents.
  • HVE : Certification donnée dès lors que les exploitations réduisent leur usage des produits phytosanitaires et n’utilisent pas de produits CMR (Cancérigènes Mutagènes et Reprotoxiques). Sur ses 6 traitements de saison, Christophe a toujours réduit à demi dose les 3 premiers traitements (fermeture de la moitié des buses).


Résultats (+ et -) constatés des nouvelles pratiques

Les 3 premières années qui ont suivi la mise en place du semis direct ont été difficiles car il ne maîtrisait pas encore la méthode du semis. Ses cultures manquaient souvent d’azote. Il a ainsi perdu 50% de son rendement en céréales. Il a donc dû ressemer et a perdu de l’argent.

Aujourd’hui, il maîtrise totalement cette pratique, il sème et ajoute l’azote simultanément (azote dans le semoir). Le manque d’azote pour la culture est vérifié avec la méthode de la double bande. Une bande de la culture est sur-semée en doublant la densité de semis. Dès lors que le couvert sur cette surface est jaune, un apport d’azote est effectué sur toute la parcelle.


Autonomie

Christophe produit ses propres semences de blé tendre.


Equipement

Tout est mécanisé. Il dispose de :

  • Vendangeuse mécanique
  • Plusieurs tracteurs de 80-90 CV
  • Pulvérisateur
  • Semoir à disques (Horsch Avatar)
  • Gyrobroyeur
  • Décompacteur


Investissements

Son dernier investissement a été il y a 3 ans pour un tracteur John Deere de 250 CV d’une valeur de 180 000€ pour ses grandes cultures.


Commercialisation

  • Christophe commercialise ses bouteilles au caveau, en vente directe (Café, Hôtels et Restaurants) en export et en grandes surfaces. Le marché de la vigne est assez régulier. La sélection de ses cépages dépend du cours du vin, en ce moment le Chardonnay est le plus vendu.
  • Les céréales sont vendues directement en coopérative (Arterris) à la récolte. Certaines sont contractualisées et le blé tendre est vendu au MATIF (Marché À Terme International de France).


Caveau du Domaine

Stockage

  • Le vin est transformé sur site dans le caveau. Christophe dispose de cuves en inox ultra modernes.
  • Pas de stockage des céréales.


Bilan économique, social, environnemental

Bilan économique

  • PAC :
    • Aides HVE 4[1] de l’écorégime : 63,72€/ha
    • DPB (Droits à Paiement de Base): 150€/ha
    • Ecorégimes (anciennement Paiement Vert [3]ou Verdissement) : entre 50 et 80€/ha
  • Diminution des charges grâce au semis direct : 30% de GNR (Gazoil Non Routier) en moins
  • Augmentation des coûts des matières premières et de la main d’œuvre


Bilan social

Jusqu’à il y a quelques années, son travail était pour lui un hobby. Avec l’âge, certaines tâches deviennent plus difficiles. Christophe ne se sent pas isolé. Cependant, il affirme l’existence d’une pénibilité morale en agriculture plus présente que dans d’autres métiers à cause de la météo (épisodes pluvieux aléatoires, épisodes de gel, de sécheresse…) ou encore de la recherche constante de clients pour vendre ses productions.

Il prend ses week-ends mais part peu en vacances (4 jours pris en 2 ans), et travaille entre 50 et 80 heures par semaine.


Bilan environnemental

  • Bon rapport champignon/bactérie de son sol
  • Présence de vers de terre
  • Réduction des produits phytosanitaires (3 traitements sur 6 en demi-dose)


Avantages / limites des pratiques mises en place

Avantages

Le semis direct :

  • Est facile à mettre en place.
  • Réduit les coûts associés à un travail du sol (essence divisée de 30%, pas de cover crop, pas de chaume, pas de herse).
  • Améliore la structure du sol et crée de la porosité (meilleure infiltration de l’eau), ce qui empêche les ronds d’eau.[4][5][6][7]

Limites

Avec le semis direct :

  • Une compétition entre le couvert permanent et la culture d’intérêt est à anticiper.
  • La gestion des adventices est plus complexe.
  • Le rendement n’est pas aussi élevé qu’en semis sur sol travaillé.
  • Le semoir doit être adapté à cette pratique, ce qui représente un coût supplémentaire.[4][5][6][7]


Perspectives

Christophe prévoit sa retraite dans 4 ans. La transmission est assurée par ses enfants et ses petits enfants qui travaillent sur le domaine.


Conseils de l’agriculteur

Semis direct : Attention à la gestion de l’azote les premières années, ne pas se laisser décourager.

Christophe conseille à chaque agriculteur de ne pas se comparer aux autres et de faire ce qu’il peut avec ce qu’il a.


Pour aller plus loin sur le semis direct

Effet du semis direct sur les propriétés et les caractéristiques du sol :

  • Matière organique : Augmentation de 25% en moyenne du taux de matière organique jusqu’à 40 cm de profondeur. Les différences entre conventionnel et semis direct sont d’autant plus importantes sur le long terme[8].
  • Structure : Meilleure structure en semis direct, d’autant plus marquée sur le long terme, et limitation de l’érosion[8].
  • Porosité : Plus élevée en semis direct, de l’ordre de +4% par rapport à un semis conventionnel[9].
  • Infiltration de l’eau : Plus faible en semis direct s’il n’y a pas de couvert végétal[9].

Effet du semis direct sur le blé tendre[9] :

  • Levée : Augmentation de 15% en moyenne du pourcentage de levée en semis direct par rapport au conventionnel, expliquée par la régularité de la profondeur du semis et une bonne adhérence de la graine avec le sol, mais une réduction de la levée en semis direct est parfois observée à cause de dégâts dus aux limaces.
  • Rendement : Similarités des rendements en semis direct et en conventionnel. Au début de la mise en place du semis direct, les rendements peuvent être moins bons qu’en conventionnel.


Sources et références

La version initiale de cet article a été rédigée par Elise Gatel, Eléa Missonnier et Mélodie Calvier,

étudiantes en agronomie à l'Institut Agro Montpellier, suite à l'interview de Christophe Muret, réalisée le 25/02/2025.

  1. Revenir plus haut en : 1,0 et 1,1 https://po.chambre-agriculture.fr/actualites/detail-de-lactualite/page/3/actualites/hveeco-regime-en-2024-seule-la-nouvelle-version-v4-sera-eligible-aux-eco-regimes-de-la-pac-1/
  2. https://www.arvalis.fr/infos-techniques/attention-aux-degats-de-la-larve-du-zabre-sur-graminees-fourrageres-et-cereale
  3. https://agriculture.gouv.fr/paiements-decouples-le-paiement-vert
  4. Revenir plus haut en : 4,0 et 4,1 M. RAUNET, L. SEGUY, C. FOVET-RABOT. 1999. Semis direct sur couverture végétale permanente du sol. Gestion agrobiologique des sols et des systèmes de culture, pp 41-49. https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=NZ8jCwAAQBAJ&oi=fnd&pg=PA41&dq=semis+direct&ots=hD0Zf1-hnH&sig=iGyY9w9-xGWRlazV1FFNDgBH7Fg#v=onepage&q=semis%20direct&f=false
  5. Revenir plus haut en : 5,0 et 5,1 https://www.agro-league.com/semis-direct
  6. Revenir plus haut en : 6,0 et 6,1 https://gers.chambre-agriculture.fr/fileadmin/user_upload/Occitanie/067_Inst-Gers/1-DOCUMENTS/grandescultures/Techniques_culturales_innovantes/fiche_techniques_culturales/Semis_direct.pdf
  7. Revenir plus haut en : 7,0 et 7,1 https://www.kuhn.fr/techniques-agricoles/techniques-culturales-simplifiees/quelles-tcs/semis-direct/pourquoi-choisir-semis-direct
  8. Revenir plus haut en : 8,0 et 8,1 Laghour, M., Moussadek, R., Mirabet, R., & Mekkaoui, M. (2019). Effet à moyen et à long terme du Semis direct sur la matière organique, la stabilité structurale et la compaction des sols argileux au Maroc. Revue Marocaine Des Sciences Agronomiques Et Vétérinaires, 7(2). https://agrimaroc.org/index.php/Actes_IAVH2/article/view/701
  9. Revenir plus haut en : 9,0 9,1 et 9,2 Mekhlouf, A., Makhlouf, M., Makhlouf, M., Achiri, A., Ait Ouali, A., & Kourougli, S. (2011). Etude comparative de l’effet des systèmes de travail du sol et des précédents culturaux sur le sol et le comportement du blé tendre (Triticum aestivum L.) en conditions semi-arides. Agriculture, 2(2), 52-65. https://asjp.cerist.dz/en/article/5941


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Ce portrait a été rédigé en partenariat avec l'Institut Agro Montpellier

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