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Stimulation des défenses naturelles des plantes grâce aux extraits fermentés d'ortie

De Triple Performance
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Crédit photo : Adrien Bloux


Antoine Chedru met en place cette pratique dans un objectif de réduire drastiquement l’utilisation de fongicides et se passer d’insecticides de synthèse à l’échelle de son système de culture. Il souhaite allier protection fongique et préservation de l’état biologique de ses sols par l’utilisation des extraits fermentés. Enfin, Antoine y voit une diminution de certaines charges et une amélioration de la marge brute globale de son système. De plus, travailler sur de nouvelles thématiques alternatives l’intéresse particulièrement.

Contexte de la mise en œuvre

Origine de la pratique et cheminement de l’agriculteur

Pratique mise en place à l’issue d’une formation de 5 jours avec le GIEE Sol en Caux chez Eric Petiot en 2015. Suite à cette formation, la pratique à été testée au niveau de groupe où plusieurs agriculteurs ont mis en place des essais simultanément, facilitant ainsi les échanges techniques et la comparaison des résultats obtenus. Antoine Chedru a ensuite perfectionné la pratique en travaillant sur la qualité de l’eau et affiner les stades d’interventions.

Culture cible : A l’origine sur blé, désormais toutes cultures et couverts.

Bioagresseurs : Maladies fongiques, pucerons.

Objectifs

  • Utiliser des extraits fermentés d’ortie comme biostimulants pour renforcer l’immunité naturelle des plantes.
  • Diminuer drastiquement les fongicides et insecticides de synthèse.
  • Améliorer la marge globale sur l’exploitation en augmentant les rendements tout en limitant l’achat de produits phytosanitaires.

Description de la technique

Date de début de mise en œuvre 2015.

Préparation

  • Immerger 1kg d’orties fraîches fauchées avant floraison dans 10 L d’eau.
  • Laisser macérer durant une dizaine de jours selon la température extérieure (exemple : 10 jours à 20°C).
  • Brasser régulièrement la préparation.
  • Filtrer le produit au tamis.
  • Conserver plusieurs mois au frais, à l’abri de l’air, du gel et de la lumière.

L’eau de pulvérisation

  • Un pH autour de 6 (6.3 à l’optimum).
  • Une dureté de 20-24 °F.
  • L’eau de pluie est bien adaptée.

L’application

  • Utiliser en préventif de 4 à 10 L/ha, volume de bouillie 80 L/ha.
  • Ne pas mélanger avec un fongicide.
  • Adapter le reste de l’itinéraire technique : pas de semis précoce et variétés résistantes.

Mise en œuvre et conditions de réussite

Une bonne préparation de la matière première est primordiale dans la réussite de la pratique. Le meilleur stade pour la fauche est avant floraison de l’ortie. Le suivi de la macération est également essentiel dans la réussite de la pratique. Les contrôles réguliers du redox, de la conductivité, du pH, s’avèrent indispensables afin d’obtenir les meilleures conditions possibles avant filtration.

Les résultats obtenus sont confirmés par la mise en place d’essais et des relevés aux champs dans le cadre du groupe DEPHY.

Les observations et les mesures (analyses de sève, mesure du taux de Brix) sont également nécessaires afin de déterminer précisément les meilleures conditions d’intervention.

Se tenir informé et se former sont également un gage de réussite. Antoine Chedru réalise une formation cette année, c’est sa troisième depuis 2015.

La pratique au sein de la stratégie de l'agriculteur

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Les résultats attendus

  • Rotation longue afin de favoriser l’alternance des cultures et la diversité spatiale et temporelle.
  • Se passer des fongicides de synthèse grâce aux extraits fermentés lorsque la pression le permet.
  • Trouver de la valeur ajoutée et des marges satisfaisantes grâce aux blés de deux ans et la présence du lin textile.

Témoignage de l’agriculteur

Antoine Chedru. Crédit photo : Simon Pesquet

"On a jamais vu d’effets négatifs sur les rendements de tous les témoins. Dans les autres essais que l’on a fait, il y a un petit effet oligoélément et sur les insectes aussi, donc on continue.

Il faut bien prendre en compte que c’est une combinaison de pratiques, ce n’est pas simplement les extraits seuls, il y a l’activité biologique de son sol, un suivi dans la nutrition des cultures […] je réalise des analyses de terre et de sève régulièrement sur les parcelles, cela peut être 2 à 3 analyses de sève en végétation et je complète par l’apport de micro doses d’oligoéléments.

Une des limites est le nombre de sorties du pulvérisateur qui peut être important. Le pulvé, il sort plus pour épandre des extraits fermentés de plante, des huiles essentielles que des matières actives de synthèse […].

Maintenant on a les panneaux Ecophyto, on communique beaucoup sur ce thème- là."

Avantages

  • Baisse significative des IFT fongicides et insecticides depuis 5 ans.
  • Effet non dépressif sur les rendements.
  • Pratique relativement peu coûteuse à hauteur de 50 centimes le litre, équivalent à 10 € le passage.
  • Amélioration de la marge brute globale.
  • Meilleure compréhension des mécanismes de défense des plantes.

Limites

  • Nombre important de passages nécessaires pour valoriser les extraits.
  • Justification auprès des riverains sur le nombre de sorties du pulvérisateur.
  • Une observation fine des parcelles pour déclencher les interventions représente un temps non négligeable.

Améliorations ou autres usages envisagés

Des travaux de recherche se poursuivent sur de nouvelles plantes à utiliser. La consoude, à l’effet biostimulant en début de cycle, est arrivée après l’ortie en 2017. Les deux espèces peuvent être utilisées en mélange. La fougère a des résultats également intéressants, mais elle n’est pas encore utilisée par Antoine.

Utilisés à l’origine sur blé, les extraits sont désormais appliqués sur toutes les cultures dès le semis et sur les couverts végétaux. En parallèle, un gros travail est réalisé sur l’eau de pulvérisation, sur la qualité du filtrage de l’eau afin d’obtenir une eau avec une qualité optimale.

Analyse des extraits fermentés d'ortie

Analyse réalisée par le laboratoire Labéo.
Chimie
pH 5.3
Potentiel Redox (mV) 18
Conductivité (mm/cm) 3.7
Eléments fertilisants (mg/L)
Potassium 594
Calcium 473
Azote total Kjeldhal 190
Phosphore 162
Azote NH4 140
Magnésium 85.2
Oligoéléments mg/L
Zinc 187
Fer 1.35
Manganèse 1.05
Aluminium 0.22
Nickel 0.06
Cuivre 0.08
Sélénium 0.025

Les conseils de l'agriculteur

"Pour cette pratique il faut commencer par une formation. Partir tout seul, sans expérience, c’est aller au casse-pipe. Il y a des erreurs à éviter, comme j’ai vu dans certains reportages, telle que la fauche de l’ortie en fleur alors qu’elle a perdu tous ses oligoéléments […] une formation c’est essentielle!"

Moyenne des marges brutes et IFT fongicide

Synthèse des essais chez Antoine en 2016-2020.

Chedru IFT.png


Indicateurs de résultats

Niveau de

satisfaction/

performance

Commentaires

de l’agriculteur

Maîtrise des

adventices

Neutre Cette pratique ne

cible pas les adventices

Maîtrise des

ravageurs

Positif Pas de problématiques

observées

Maîtrise des

maladies

Positif Peu de symptômes

observés

IFT de la(les)

culture(s)

concernée(s)

Positif Réduction IFT

fongicides et

insecticides

IFT du

système de

culture

Positif Réduction globale

fongicide et

insecticide

Rendement Positif Aucun effet

pénalisant sur

le rendement voire

augmentation

Temps de

travail dans

la parcelle

Neutre Augmentation du

nombre de passages

de pulvérisateur

Temps d’observation Neutre Augmentation du

temps d’observation

Charges de

mécanisation

Positif Faible impact
Marge

semi-nette

du système

Positif Baisse de charges,

augmentation de

la marge

Prise de

risque

Positif Prise de risque faible

lorsque la technique

est bien maîtrisée

Niveau de satisfaction de l’agriculteur : Négatif = Non satisfait / Neutre = Moyennement satisfait / Positif = Satisfait

Ce que retient l’agriculteur

"C’est une technique qui me permet de baisser mes IFT sans impacter négativement le rendement […] c’est une pratique qui à un très bon retour positif auprès de la population. Par contre, au sein du milieu agricole c’est plus compliqué. Il y a certains agriculteurs qui ne voient pas les effets et les avantages de ce genre de pratiques. Il y a encore des progrès à faire dans ce sens."

L'avis de l'ingénieur réseau DEPHY Simon Pesquet (Cerfrance Normandie Maine – ARAD²)

L’utilisation des extraits fermentés de plantes fait partie des pratiques émergentes de plus en plus mobilisées par les agriculteurs. En plus de renforcer l’autonomie de l’agriculteur dans ses stratégies de protection des cultures, les résultats obtenus sont présents. En témoignent les essais menés chez Antoine depuis 2016, qui ont permis de mettre en évidence l’effet biostimulant des extraits fermentés d’ortie sur le blé, à la fois sur la résistance aux bioagresseurs et sur le gain de rendement.

La réussite de cette pratique dépend d’une stratégie globale et d’une combinaison de leviers agronomiques : diversité génétique spatio-temporelle, date de semis tardive, densité de semis non excessive et une fertilisation fine et raisonnée.

Cette pratique nécessite également une technicité et un temps d’observation important, notamment dans le suivi de la préparation et dans le déclenchement des interventions.

Pour aller plus loin

Sources

Les extraits fermentés d'ortie pour stimuler les défenses naturelles des plantes - Ecophyto DEPHY. Document réalisé par Simon Pesquet (spesquet@nm.cerfrance.fr).


Action du plan Ecophyto piloté par les ministères en charge de l’agriculture, de l’écologie, de la santé et de la recherche, avec l’appui technique et financier de l’Office Français de la Biodiversité.

Logos REXChedru.png


Leviers évoqués dans ce système

Matériels évoqués dans ce retour d'expérience

Cultures évoquées

Bio-agresseurs évoqués


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