Changement de système pour plus d’autonomie, de bien être animal et protéger les zones humides grâce à une meilleure gestion des prairies

De Triple Performance
Aller à :navigation, rechercher
Guy Legrain

Guy Legrain, éleveur de vaches laitières dans le Nord, a adopté des pratiques agroécologiques qui sont soutenues par un projet de Paiement pour Services Environnementaux (PSE). Parmi ces actions figurent la gestion durable des haies et des voies d'eau, l'hétérogénéité culturale, la fauche tardive, le pourcentage de prairies pâturées, la réduction des apports d'azote minéral ainsi que de son IFT moyen.


Présentation

Contexte

  • Nom : Guy Legrain.
  • Localisation : Saint-Amand-les-Eaux (59230).
  • Statut : Agriculteur, membre du conseil d'administration de la CUMA.
  • Exploitation : GAEC Saint Jean-Baptiste.
  • Production : Lait (il a le droit de produire 660 000 L/an de lait mais il n'en produit que 350 000 L/an), blé, orge, maïs, pomme de terre, betterave.
  • SAU : 147 ha pour le GAEC, dont 92 ha à Guy. Sur ces 92 ha : 69 ha de prairies permanentes naturelles, 13 ha de maïs, 10 ha de prairies temporaires (PT) en rotation sur 5 ans avec des céréales pour la vente (blé).
  • UTH : 2,5 sur le GAEC, Guy, son cousin et 1 salarié à mi temps.
  • Cahier des charges : Filière écoresponsable au niveau de la laiterie. Démarche Label haie en cours.
  • Cheptel : 85 vaches laitières (VL) Prim’Holstein et 20 allaitantes. Pas de monotraite, ni de robot de traite.
  • Contexte (géographique, pédoclimatique, social…) : Sols limono-sableux, zone Natura 2000 et Site RAMSAR = zone humide d'importance internationale. La ferme est située en milieu péri-urbain.
  • Commercialisation : Laiterie Sodiaal et Filière écoresponsable.


Historique

  • 1994 : Guy rejoint le GAEC familial avec son père, et son frère.
  • 1996 : Départ en retraite de son père, le GAEC est alors composé de son frère et lui.
  • 2014 : Le cousin de Guy rejoint le GAEC. L’exploitation faisait alors environ 150 ha dont 65 ha de prairies naturelles et le reste en terres labourables, un droit à produire de 660 000 L/an, une 20aine de vaches allaitantes, 30-35 ha de céréales (blé et orge d’hiver), 20 ha maïs ensilage. L’année d’installation a été compliquée car regrouper 2 troupeaux n’est pas simple. Ils ont voulu moderniser et rationaliser le travail, il n’y a pas eu de volonté d’intensifier la production.
  • 2015 : Crise du lait + la réforme de la PAC ont engendré de grosses difficultés financières. Ceci a déclenché l’envie de changement pour être moins dépendant des aides.
  • 2016 : Année très humide sur le printemps qui a engendré des rendements de céréales très faibles.
  • 2018 : Départ en retraite du frère de Guy.
  • 2021 : Engagement dans le PSE.


Rotation

La prairie temporaire est en rotation sur 5 ans avec une céréale.



Motivations

Suite à des difficultés techniques (santé du troupeau, potentiel modeste des terres) et financières (frais en hausse, baisse du prix du lait), Guy a souhaité faire évoluer fortement le système d’élevage depuis 2015, passant à un système de plus en plus herbager et pâturant pour être le plus autonome possible. Guy a d’abord fait des dérobés, puis ressemé des prairies à la place du maïs (le maïs a ainsi été réduit progressivement de 30 à 13 ha) pour produire de l’ensilage d’herbe et avoir un bloc de pâturage plus conséquent autour du bâtiment, en plus des prairies naturelles. Différents mélanges ont été implantés, ray-grass, trèfle, dactyle ou fétuque, plantin, chicorée. Mais la conduite du pâturage n’était pas satisfaisante, car les repousses après la fauche tombaient rapidement en panne et les prairies se dégradaient trop vite.


La rentabilité économique étant la priorité, la quantité de lait produite par vache n’est plus le critère unique de pilotage, Guy cherche avant tout à réduire les charges (mécanisation, alimentation, vétérinaires…) et à améliorer la santé du troupeau et le bien-être au travail, ce qu’il a réussi à faire grâce à l’accompagnement du Réseau Pâtur’Ajuste.


Comme Guy participait à la commission agricole du parc du PNR, ça lui a permis de voir d’autres systèmes. Donc en 2016 et 2017 il a cherché des alternatives et s’est plus orienté sur l’herbe. Il a remis des terres labourables en prairies temporaires et a poussé le pâturage pour réduire sa dépendance à l’herbe. Il a pu améliorer son parcellaire en regroupant des parcelles autour de son bâtiment. Aujourd’hui, il est arrivé dans un système plus pâturant que 20 ans en arrière car il a pu regrouper 30 ha autour de son bâtiment alors qu’il n’en avait que 3 au départ.

Guy a participé à la construction du PSE territorial du PNR Scarpe-Escaut. Le PSE s’applique à l’ensemble de la SAU du GAEC (147 ha) malgré le fait que son cousin n’ait pas les mêmes pratiques que lui.


PSE territorial du PNR Scarpe-Escaut

Indicateurs du PSE PNR Scarpe-Escaut

Le montant des PSE est évalué au travers d’indicateurs de mesures calculés chaque année qui permettent une proportionnalité entre performance et rémunération. Aucune pénalité n’est appliquée si les objectifs ne sont pas atteints, seuls les services effectivement rendus sont rémunérés. L’aide est surfacique (à l’hectare) et s’applique à l’ensemble de la SAU de l’exploitation.

Pour être éligibles au dispositif PSE, les agriculteurs doivent avoir au moins une parcelle en herbe déclarée à la PAC sur les trois communes de Nivelle, Saint-Amand-les-Eaux et Bruille-St-Amand, et avoir le siège de leur exploitation situé dans le Parc naturel régional Scarpe-Escaut.

Calcul de la rémunération du PSE PNR Scarpe-Escaut


La gestion des structures paysagères

Densité de haies et voies d’eau gérées durablement sur l’exploitation (fossés, cours d’eau gérés par l’exploitant agricole)

Objectifs : Maintenir les linéaires existants et favoriser leur gestion durable au travers du cahier des charges du Label Haie et d’un plan de gestion du réseau hydraulique.


  • Date de mise en œuvre : 2021.
  • Cet indicateur revêt une importance particulière pour ce territoire, contrairement à d’autres zones bocagères où il n’est pas pertinent. Il concerne des haies naturelles de hautes ou moyennes tiges, composées notamment de saule (têtard pour la production de bûches), aulne, tilleul, cornouiller sanguin, aubépine, prunellier, peuplier et chêne.
  • Depuis le début du suivi, il n’y a pas eu d’évolution : l’indicateur a simplement été maintenu, car Guy disposait déjà de la note maximale (1) dès le départ, avec 114 ml/ha, soit un total de 17 km de haies et de 15 km de voies d’eau.
  • Ces haies sont situées en limite de parcellaire, souvent le long de fossés ou de frontières avec les exploitations voisines. Guy utilise principalement des clôtures électriques, les haies ne posent pas de problème, sauf lorsqu’elles coupent la clôture. L’entretien des haies selon les critères du Label haie a représenté une nouveauté pour lui.
  • La deuxième année, via la CUMA et sur le conseil du PNR, ils ont acquis du matériel : un bras d’épareuse équipé d’une scie (lamier) montée sur le bras, permettant de maîtriser les haies de manière soignée et conforme aux critères du label. L’épareuse, avec sa tête classique, sert également à broyer les bords de champs.
  • Les haies offrent un ombrage appréciable pour le bétail, qui en profite également pour grignoter quelques branches. Guy a remarqué qu’à l’ombre, l’herbe persiste, même lorsque tout est grillé alentour.


Guy est accompagné dans cette démarche par l’animateur du PSE au sein du PNR, Vivien Ponnou-Delaffon. L’entretien est réalisé progressivement au fil de l’année et dans le respect des dates d’entretien : Guy se fait aider par un membre de la CUMA qualifié pour utiliser le matériel, et Vivien intervient ensuite pour vérifier s’il y a des retouches à effectuer.



La gestion des systèmes de production

Hétérogénéité culturales

Prairie

Objectifs : Favoriser la présence de couverts pluriannuels au sein des exploitations, ainsi que la diversité des cultures dans la rotation. Cet indicateur mesure sur une échelle de 1 à 10 points l’importance de chaque culture dans l’assolement et valorise la présence d’une couverture permanente des sols :

  • Une culture annuelle fait gagner des points au prorata de la surface qu'elle occupe dans la SAU, avec un maximum de 10%.
  • Dès lors qu'une culture occupe plus de 10%, le nombre de points pour cette culture est plafonné à 1 puisqu’elle empêche la présence potentielle d’une culture différente.
  • Les couverts pluriannuels, en revanche, font gagner des points au prorata de la surface qu’ils occupent dans la SAU, sans plafonnement.

Les prairies = gage de bonne santé des zones humides.


  • Date de mise en œuvre : 2021.


  • Evolution de l'indicateur :
    • Année 0 : 8.7, note : 0,74.
    • Année 1 : 8.3, note : 0,66.
    • Année 2 : 8.76, note : 0,75.
    • Année 3 : 8.82, note : 0,76.
    • Année 4 : 8.3 , note : 0,66 (estimation).

La baisse de la note en année 1 s’explique par la rotation culturale : certains blocs du parcellaire sont passés des prairies temporaires aux céréales. En année 2, la note est remontée grâce au retour des prairies.


  • Détail du parcellaire inclus dans le PSE (avec les parcelles de son cousin) :
    • Prairies temporaires + prairies permanentes : 79,1 ha.
    • Blé tendre d’hiver : 25,9 ha.
    • Orge d’hiver : 5,7 ha.
    • Colza d’hiver : 5,8 ha.
    • Pomme de terre : 5,7 ha.
    • Betterave non fourragère : 3,8 ha.
    • Maïs ensilage : 21 ha.


  • Pour Guy, les prairies temporaires posent un problème au niveau de la PAC. Si elles restent en place plus de cinq ans, elles sont requalifiées en prairies naturelles. Or, Guy ne souhaite pas ce changement de statut : ses terres étant majoritairement en location, il doit conserver le statut de terres labourables vis-à-vis des propriétaires. Il a donc instauré une rotation pour préserver ce statut, mais regrette de devoir briser tous les bénéfices agronomiques des prairies à cause de cette contrainte réglementaire. Il souhaiterait que les prairies temporaires soient enfin considérées comme une culture à part entière.

Il cultive des prairies temporaires pour le pâturage et pour l’ensilage d’herbe, et pratique également l’ensilage de maïs. Sur les parcelles en prairie temporaire, lorsqu’il laboure, il implante un maïs, et neuf fois sur dix, il ne fertilise pas et ne désherbe pas.


  • Composition et gestion des prairies : Guy teste chaque année ses propres mélanges : ray-grass, fétuque élevée, fétuque des prés, dactyle, etc.

Il estime qu’il faut habituer très tôt les animaux à consommer toutes les espèces présentes. Ainsi, les génisses vont au pâturage dès huit mois, une fois adultes, elles mangent de tout. Lorsqu’il repère des zones envahies d’orties ou de chardons, il y place volontairement les animaux : ils nettoient ainsi la parcelle, ce qui évite le recours aux herbicides.


  • Il ne fertilise plus les prairies pâturées, seulement celles destinées à la fauche. Cette réduction d’apport a entraîné une baisse de la présence d’orties et de chardons. En revanche, il n’introduit plus de trèfle ni d’autres légumineuses dans ses mélanges : elles prennent trop le dessus par temps chaud, ce qui l’inquiète pour la sécurité des animaux. Il compte sur le retour spontané du trèfle.



Fauche tardive

Plan des parcs et affectation saisonnière en 2020. Cela l’aide à décider 1/ de revenir plus ou moins vite pour faire un déprimage ou un étêtage ; 2/ d’ajuster le temps de séjour pour reporter ou non de l’herbe. Les parcs d’été sont proches du bâtiment et ombragés pour éviter de faire marcher les vaches quand il fait trop chaud. Du pâturage jour / nuit est organisé avec les parcs riches en trèfles le jour et les parcs avec beaucoup d’herbe épiée la nuit.

Objectif : Maintenir la biodiversité prairiale, en retardant la fauche entre la date du 15 mai et du 15 juin.


  • Date de mise en œuvre : 2021.


  • Evolution de l'indicateur :
    • Année 0 : 0.54, note : 0,54.
    • Année 1 : 0.85, note : 0,85.
    • Année 2 : 0.645, note : 0,65.
    • Année 3 : 1, note : 1.
    • Année 4 : 0.85, note : 0,85 (estimation).


  • La date de fauche dépend de plusieurs facteurs, principalement la météo et le type de pratique : ensilage, enrubannage ou foin. Guy privilégie l’enrubannage, fait un peu de foin et consacre une grande partie de ses surfaces (70 %) au pâturage. Seuls 20 hectares sont dédiés à la fauche.
  • Les prairies de fauche sont récoltées une fois, puis pâturées. Le pâturage s’adapte à la pousse de l’herbe : Guy laisse volontairement en place l’herbe âgée (les refus) pour que, lors du passage suivant, les animaux trouvent à la fois de l’herbe jeune et plus mature, équilibrant ainsi la bouchée. Cette pratique contribue également à conserver l’humidité du sol en créant un microclimat, un peu comme le font les haies.
  • En année 1, Guy a fauché plus tard, ce qui a permis d’obtenir une meilleure note. En année 2, il a dû avancer la fauche à cause des conditions météo. L’année 3, très humide, n’a pas permis de faucher tôt : les terres étant impraticables, la note a été maximale. Cette année-là, tous les agriculteurs du secteur ont obtenu la note de 1. L’ensilage plus mûr a été effectué entre le 10 et le 12 juin, et le foin fin juin. Le foin est stocké en meules, séchées naturellement à l’extérieur ; Guy ne pratique pas le séchage en grange. Lorsque les conditions sont défavorables, il préfère l’enrubannage.
  • Pour lui, l’inconvénient de cet indicateur est sa forte dépendance à la météo annuelle.


% de prairies pâturées

Vaches en pâture.

Objectifs : Maintenir les systèmes d’élevage, acteurs majeurs dans le maintien des zones humides, en maintenant le pâturage de 60 à 80 % des prairies.


  • Date de mise en œuvre : 2021.


  • Evolution de l'indicateur :
    • Année 0 : 74 %, note : 0,70.
    • Année 1 : 70 %, note : 0,50.
    • Année 2 : 70 %, note : 0,50.
    • Année 3 : 69,2 %, note : 0,46.
    • Année 4 : 70 %, note : 0,50 (estimation).


  • L’indicateur reste globalement constant par choix, car il dépend surtout de l’aménagement des parcs et clôtures, que Guy modifie peu. Une baisse peut survenir en cas de tempête endommageant les clôtures ou lors d’années très humides. La diminution entre les années 0 et 1 s’explique par la modification du parcellaire liée à la mise en place d’un bloc de prairie temporaire en rotation avec les céréales.
  • Guy a échangé des parcelles avec d’autres agriculteurs pour regrouper ses terres autour de ses bâtiments. Même si certaines sont moins fertiles, il y gagne en autonomie grâce à la réduction des déplacements de bétail, quitte à récolter un peu moins. Les vaches restent dehors la majeure partie du temps, sauf en hiver lorsque l’humidité est trop importante. Le parcellaire destiné aux laitières est groupé, tandis que d’autres blocs sont réservés aux génisses et aux taries.
  • L’intégration à la démarche Patur’Ajuste en 2018 l’a beaucoup aidé à développer le pâturage. Auparavant, il mettait les taries et génisses dans l’herbe haute à la mi-juillet, car les prairies humides n’étaient pas accessibles plus tôt. Patur’Ajuste lui a confirmé la pertinence de cette pratique et continue à lui fournir de nombreux conseils.
Retour d'expérience Patur'Ajuste de Guy Legrain
  • "C’est à nous de nous adapter aux prairies naturelles, et ça marchera mieux."


La quantité d’azote minéral sur la totalité de la SAU

Fertilisation naturelle des pâtures.

Objectifs : Préserver la flore prairiale et la qualité des eaux en diminuant la quantité moyenne d’engrais azotés minéraux en dessous de 135 unités d’azote (UN).


  • Date de mise en œuvre : 2021.


  • Evolution de l'indicateur :
    • Année 0 : 80 UN, note : 0,41.
    • Année 1 : 48,6 UN, note : 0,64.
    • Année 2 : 52 UN, note : 0,61.
    • Année 3 : 48 UN, note : 0,64.
    • Année 4 : 48,6 UN, note : 0,64 (estimation).


  • Guy ne réalise pas d’apport d’azote minéral sur les prairies pâturées, celles-ci étant naturellement fertilisées par les vaches. Cette pratique lui a permis de réduire ses apports entre l’année 0 et l’année 1. En année 2, la quantité d’azote minéral utilisée a augmenté en raison d’une part plus importante de céréales dans la rotation, cultures qui ont été fertilisées. La première année d’arrêt de la fertilisation minérale a été difficile sur le plan psychologique : Guy doutait en voyant ses voisins continuer à fertiliser.
  • Pour limiter l’usage d’azote minéral, il utilise le fumier issu de son élevage pour fertiliser ses cultures. Toutefois, il n’en produit pas assez pour se passer totalement d’azote minéral. Sur certaines prairies temporaires et cultures, il utilise également ponctuellement des boues urbaines. Lorsque les conditions le permettent, il apporte également de l’azote minéral sur les prairies de fauche non clôturées (qui ne sont pas pâturées ensuite), sans dépasser 60 unités d’azote.
  • C’est grâce à la démarche Patur’Ajuste qu’il a arrêté la fertilisation minérale sur les prairies permanentes.
  • Le matériel d’épandage est mutualisé via la CUMA.
  • Résultats : Visuellement, il a constaté moins d’herbe que chez eux la première année, mais pas la deuxième. Il pense que les plantes ont alors développé un système racinaire plus profond, leur permettant de mieux résister à la sécheresse par rapport aux prairies voisines. L’arrêt de la fertilisation a également augmenté l’hétérogénéité des pâtures, offrant une plus grande souplesse dans la gestion : les parcelles ne poussent pas toutes en même temps. Ainsi, mi-juin, il peut encore faire pâturer certains parcs, alors qu’avec la fertilisation, la montée en graines rendait le pâturage difficile dès la mi-mai.
  • Conseil de Guy : "Arrêter sur une partie seulement pour ne pas se faire peur, et avancer progressivement." L’apport financier du PSE permet d’avoir un filet de sécurité lors d’un changement de pratiques et motive à expérimenter.


IFT global de l’exploitation

Objectifs : Préserver la qualité des eaux en diminuant la quantité de produits phytosanitaires. L’indice de fréquence de traitement (IFT) de référence du territoire est de 5,4. L’objectif est de diminuer l’IFT des exploitations de 40 % par rapport à cet IFT de référence.


  • Date de mise en œuvre : 2021.


  • Evolution de l'indicateur :
    • Année 0 : 48,5 %, note : 1.
    • Année 1 : 37 %, note : 1.
    • Année 2 : 46 %, note : 1.
    • Année 3 : 41.1 %, note : 1.
    • Année 4 : 37 %, note : 1 (estimation).


  • Guy fait un usage raisonné des pesticides et atteint la note maximale sur cet indicateur depuis le début du PSE. La baisse observée entre l’année 0 et l’année 1 s’explique par une année sèche (2022), où la pression maladie était faible. Lors des années plus humides, il doit toutefois ressortir le pulvérisateur.
  • La présence importante de prairies temporaires contribue à sa bonne note. Guy, déçu par les résultats des pulvérisations, préfère en limiter l’usage au strict nécessaire. Il a appliqué un herbicide et un fongicide contre la rouille, mais regrette cette intervention car il avait semé une variété censée être résistante.
  • Cela fait au moins 10 ans qu’il n’a pas utilisé d’insecticide. Il n’emploie pas non plus de glyphosate, ne rencontrant pas de problème de chiendent. Pour lui, cela démontre l’intérêt d’inscrire la prairie temporaire (PT) comme culture principale dans la PAC. Il a pu en avoir la confirmation lors de sa participation à une formation collective dispensée par la Chambre d’Agriculture NPDC aux exploitants signataires d’un PSE  et accompagnés par le PNR Scarpe-Escaut.
  • Il reconnaît avoir du mal à s’adapter à la prairie temporaire (PT), car les semences achetées sont pensées pour la productivité et nécessitent des apports nutritifs, ce qu’il juge incohérent. Il souhaite produire de la PT la plus naturelle possible. Il achète des semences et réalise lui-même ses mélanges. Les gammes de semences changeant tous les deux ans, il regrette qu’une variété performante ne soit plus disponible peu après. Certains de ses pairs lui reconnaissent toutefois le bon sens de sa démarche. Le PSE lui permet d’expérimenter différents mélanges et les accompagnements dont il bénéficie grâce aux différents programmes de l’Agence de l’Eau l’incite dans ce sens. Par exemple, sa parcelle de blé qui redevient une prairie temporaire sera divisée en deux où une petite partie ne sera ni travaillée, ni ressemée pour faire de la régénération naturelle à l’aide de la banque de graines présentes dans le sol.


Bilan

Guy n’a pas modifié fondamentalement son système pour l'améliorer et rentrer dans le PSE, il s’était engagé dans toutes ces démarches avant 2021. Il continue cependant ses expérimentations avec plus d’assurance grâce au PSE.


Résultats

  • Guy estime ne rien avoir inventé : il a simplement fait des choix éclairés, inspirés par ce qu’il a pu observer ailleurs. Pour lui, il est important d’aller voir même ce qui ne nous attire pas a priori. Il se dit satisfait de sa situation actuelle : "Quand je me lève le matin, je n’ai plus d’épée de Damoclès au-dessus de la tête."
  • Son engagement dans le syndicat local l’a conduit à intégrer la commission agricole du parc naturel régional (PNR), ce qui lui a permis d’élargir ses perspectives et de s’impliquer dans des démarches collectives. C’est ainsi qu’il a rejoint Patur’Ajuste et le PSE. Il a toujours cherché à concilier écologie et économie, estimant que l’une ne vaut pas sans l’autre.
  • Pour lui, les prairies naturelles sont plus adaptées au terroir et plus résilientes face aux aléas.
  • Sur le plan économique, sa marge brute reste inférieure à la moyenne car il produit moins. Mais il considère que ce n’est pas l’indicateur pertinent : ce qui compte, ce sont les charges de structure, et sur ce point il se situe bien. Selon lui, il faudrait davantage parler des coûts de production que de la marge brute, car ces deux notions ne reflètent pas la même réalité.


Rémunération

  • La rémunération moyenne sur le groupe est de 102€/ha, Guy lui se situe dans la fourchette haute.
  • La rémunération perçue permet d’améliorer la trésorerie, et de faire des investissements dans le matériel d’élevage comme par exemple lorsqu'il a mis en place un PCAE (Plan de Compétitivité et d'Adaptation des Exploitations agricoles) pour aménager ses passages de vaches : 600m avec des éco-dalles pour faciliter l’accès aux pâtures.


Contrôles, audits et accompagnement

Guy Legrain et Vivien Ponnou-Delaffon.

Le contrôle est organisé de la manière suivante :

  • Le PNR assure l’animation, les démarches administratives (déclarations sur la plateforme Démarches simplifiées et sur PSE Environnement, la rédaction des dossiers, le suivi technique, le plan de gestion des haies et la labellisation « Label haie ».
  • Un bureau d’étude vérifie la bonne application des méthodes de calcul des indicateurs et la justesse de la rémunération.

Vivien, l’animateur du PSE, gère toutes les démarches. Il consacre une demi-journée de rendez-vous avec chaque agriculteur pour réaliser le bilan, faire les calculs et échanger sur la gestion, parler de l’année d’après. Ça permet aussi de faire le lien avec les autres actions menées au parc. Des journées techniques sont proposées par le PNR spécifiquement aux exploitants en PSE pour améliorer leurs pratiques liées aux indicateurs du PSE (formation IFT, plantation et entretien de haie) en plus des autres journées dispensées par le PNR et ses partenaires. Guy participe régulièrement à ces journées car elles lui permettent de voir d’autres pratiques et de discuter avec des exploitants qui ont une vision de l’agriculture et de l’élevage similaire à la sienne.


Si c’était à refaire ?

Guy aurait aimé partir dans le pâturage plus vite mais quand il s’est installé il n’avait pas le parcellaire qu’il a aujourd’hui.


Avantages et limites

Avantages

  • Moins d’intrants.
  • Bien-être animal.
  • Lait de meilleure qualité. Le lait est valorisé en “lait de pâturage” mais Sodiaal va prochainement arrêter cette valorisation.
  • Avec le PSE on est rémunéré sur des objectifs mais on n’est pas pénalisé si les objectifs ne sont pas atteints comme avec les MAEC parcelles (il en est parti pour rentrer dans le PSE).
  • Les réunions d’informations.
  • Le PSE est basé sur des pratiques locales et non régionales ou nationales comme le MAEC. Les indicateurs sont adaptés, c’est une approche plus cohérente.
  • L’observation de ses vaches c’est un plaisir, avant il n’avait pas le temps.
  • En changeant son système il a gagné en autonomie fourragère, en autonomie de décision, il s’est réapproprié son exploitation.


Limites

  • Toujours maîtriser l’autonomie.
  • Avoir du bon stock en fourrage, l’année passée ils ont fait du volume en stock mais pas de la qualité.
  • Il ne faut pas se figer, il faut s’avoir s’adapter. Mais il faut essayer pour voir comment l’herbe réagit, mais aussi les bêtes et l'agriculteur.


Investissements

L'épareuse et la scie ont coûté 45000€ à la CUMA, il aimerait investir dans une nacelle pour la sécurité des gens lors de la finition de la taille.


Conseils de Guy

  • Pour Guy, il ne faut pas hésiter à intégrer un PSE, ne serait-ce que pour l’ouverture d’esprit que cela apporte.
  • Il recommande toutefois de ne pas tout changer d’un coup, mais d’évoluer progressivement. Le PSE permet d’améliorer son système de manière différenciée et d’éviter la standardisation des pratiques. Il prend l’exemple des prairies : une prairie humide et une prairie sèche ne se gèrent pas de la même manière. Elles n’ont ni la même réactivité, ni le même potentiel, et il est donc essentiel d’adapter les pratiques à chacune. Selon lui, il y a tout à gagner à rejoindre un PSE.
  • Guy met aussi en garde contre l’excès de conseils extérieurs : il estime qu’il vaut mieux aller soi-même chercher l’information et observer ce qui se fait ailleurs. Chaque exploitation étant unique, les ajustements doivent se faire au cas par cas, sans chercher à entrer dans des cases toutes faites.


Perspectives

Guy ne sait pas si le PSE va être prolongé, mais quoi qu'il arrive, il va continuer son système, et essayer de gagner en productivité par vache tout en n’augmentant pas ses intrants.

Il a fait tout un travail sur les génisses et il pense que ses vaches évoluent grâce au nouveau système de pâturage. Elles sont plus résilientes, produisent du lait avec une alimentation plus grossière que de l’herbe jeune et du soja du Brésil. Il est stupéfait de la capacité des animaux à s’adapter au milieu. Ses génisses mangent de tout maintenant, il les appelle ses "chenilles processionnaires", mais le problème c’est que maintenant elles vont plus dans les haies pour les grignoter, alors il a intérêt à avoir du bon courant dans ses clôtures ! :)


Sources

  • Interview de Guy Legrain réalisée le 05/08/2025.
  • Interview de Vivien Ponnou-Delaffon, animateur Agro-Écologique au PNR Scarpe-Escaut, le 31/07/2025.
  • PSE territorial du PNR Scarpe-Escaut.


Cette page a été rédigée en partenariat avec le Ministère de la Transition Écologique.


Autres articles traitant des PSE

Chargement de la carte...


Annexes