Ferme de Karim Boutayeb

De Triple Performance
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Ferme avec verger maraîcher et production de semence.
Karim Boutayeb
Structure:Centre National d'Agroécologie Maroc Polyculture-élevage

Karim Boutayeb, agriculteur à Tamesna, au Maroc, cultive sa terre et élève ses animaux selon les principes de l'agroécologie. Voici le portrait de sa ferme.

Contexte

La ferme

  • Nom de l'agriculteur : Karim Boutayeb
  • Nom de la ferme : Ferme de Karim Boutayeb
  • Localisation : Tamesna, Maroc
  • Date d’installation : 2015
  • Surface cultivée : 5 ha.
  • Texture du sol : Sablo-limoneux.
  • Nombre de personnes travaillant sur l’exploitation (UTH) : 2
  • Climat : Selon la classification climatique de Köppen-Geiger, Rabat présente un climat méditerranéen à étés chauds (Csa). Les températures varient généralement entre 13 °C et 24 °C au cours de l’année, avec des extrêmes pouvant rarement descendre jusqu’à 5 °C ou monter jusqu’à 39 °C. Les précipitations annuelles moyennes atteignent environ 383 mm, réparties sur 52 jours de pluie par an.

Commercialisation

  • Il n’est pas encore dans une phase de commercialisation de semences, il devrait passer par un système de normalisation pour qu'il soit autorisé à en vendre. Il mentionne un contact potentiel avec Carrefour pour les produits non transformés, mais souligne que la grande distribution prélève 60 % de la marge sur les produits agricoles et semences.

Main d'œuvre

  • 1 ouvrier à temps plein.
  • Karim aimerait bien employer un autre ouvrier à temps plein, mais pour cela, il faudrait qu’il commercialise.

Production agricole :

Organisation de la ferme :

Assolement de la ferme (les proportions des surface ne sont pas respectés)

Production végétale

  • 2 Ha Verger dont 0,6 Ha en production d'agrume et plus de 1 Ha d'ancienne plantation d'avocatier. Ils souhaite a terme réduire les cultures d'avocatiers car elles sont trop exigeantes en eau et pas adapté au climat selon lui.
  • 1 Ha en maraîchage les principales cultures sont la tomate, la salade, les cucurbitacées, les haricots et le piment.
  • 2 Ha en culture céréalière avec de l'orge et le blé doux en culture principale.


Remarque :

Rang de grenadiers en bonne santé, ayant bien résisté aux épisodes répétés de vents chauds et de sécheresse survenus ces six dernières années.
  • Un verger d’agrumes a été planté par sa sœur il y a sept ans, à une période où les prix des agrumes étaient encore élevés. Depuis, le cours du citron a fortement chuté (1 dirham/kg actuellement), au point de ne plus couvrir les coûts d’irrigation. Il envisage donc de réduire le nombre de citronniers. Il cultive aussi d’autres agrumes (environ sept variétés), dont des orangers et des kumquats.
  • Des noyers lui ont été attribués dans le cadre d’un programme d’aide, mais ils ne sont pas adaptés au climat local. En revanche, les grenadiers montrent de bons résultats.
  • Il avait planté 200 avocatiers il y a dix ans, mais la majorité a été arrachée après un épisode de vent sec et chaud qui a causé leur dessèchement. Le climat sec ne convient pas à l’avocatier, trop gourmand en eau.

Production Animale :

Il ne lui reste aujourd’hui que 4 poules, alors qu’il en avait 30 auparavant. Il en a perdu progressivement, principalement à cause de chiens errants. Il prévoit cependant d’en racheter prochainement.

Etude, formation et parcours de vie

  • Karim Boutayeb a débuté son parcours par des études d’ingénieur en agronomie, avant de se reconvertir dans l’économie où il a poursuivi un master. Toutefois, à 39 ans, il décide de quitter le secteur économique, ne trouvant plus de sens à son travail.
  • En 2003, il revient vers le monde agricole, en suivant une formation en biodynamie. Il travaille ensuite à Ibiza, en Espagne, dans une exploitation agricole pendant quatre à cinq ans, puis s’engage dans la gestion d’une entreprise de vente de batteries avec sa femme.
  • Des problèmes de santé l’obligent à arrêter en 2015. Épuisé par les voyages, il choisit de retourner au Maroc pour reprendre la parcelle familiale et se consacrer à un travail plus porteur de sens.

Motivation et objectif

Karim s’est remis à travailler la terre dans l’idée que cela serait bénéfique pour sa santé. Aujourd’hui, il constate que cela a effectivement eu un impact positif : il se sent bien mieux. Sa production vise avant tout l’autosuffisance, mais à terme, il espère pouvoir la commercialiser. Il est particulièrement attaché aux principes agroécologiques, notamment le non-labour et l’utilisation de semences paysannes.

Volet Agronomique

Pratique agricole

  • Karim ne travaille pas avec du plastique sur la ferme.
    Couvert spontanée dans le verger
  • Pour le paillage, il produit lui-même la paille, car le prix de la botte à très fortement augmenté : le coût s’élève à 50 MAD la botte, alors que la taille des bottes a été réduite, avant les épisodes de sécheresse, ont pouvait acheter des bottes pour 5 Dirhams.
  • Karim Boutayeb est en non travail du sol sur les dans la partie verger et maraîchage, pour la partie céréalière l'information n'a pas été transmise.
    Verger maraîcher, des culture de carotte au milieu de rangée d'olivier.
    Verger maraîcher, des culture de carotte au milieu de rangée d'olivier.
  • Certaines zones dans le verger sont en couvert spontanée.
  • Il sème aussi de l’orge à la volée entre les arbres, en l’associant à des engrais verts comme la vesce. Il cultive également du blé doux sur la parcelle du verger. Certaines variétés locales proviennent de l’ICARDA (The International Center for Agricultural Research in the Dry Areas) qui possède un stock de semence paysanne importante.
  • Pour la gestion des couverts il fait aussi un fauchage manuel qu’il remet au sol pour gérer les couverts spontanés dans les vergers (chop and drop).
  • Il a mis en place des planches de cultures en verger maraîchers. Il est passé de petites planches de 5 à 10 m de long à des planches longues 20-25 m par 1 m de large (estimées visuellement).

Gestion de l’eau et caractéristiques pédologiques

Il dispose de trois puits, mais un seul est utilisé pour l’irrigation. Il descend à 126 m de profondeur et peut fournir de l’eau en continu pendant 24 heures. Les deux autres puits (70 m) ont une autonomie inférieure à une heure. Le bassin de stockage fait 40 m3. L’irrigation est manuelle (avec un tuyau d’arrosage), assurée par un ouvrier.

Pratique d'intérêt

Innovations, sélection et transformation de semences

Contexte

Karim pratique la sélection variétale pour adapter ses plantes au climat local. Il a commencé à produire ses semences en 2023. Il se concentre sur trois variétés de tomates : Noire de Crimée, Miel du Mexique et Cœur de bœuf orange.

Récupération de la semence et stockage

Culture de tomate avec structure pour l'ombrage en construction.

Culture de la tomate

  • Il cultive les tomates à partir de semis réalisés en février, avec une plantation fin mars et une première récolte mi-avril. Il doit faire la récolte des semences avant les fortes chaleurs.
  • Il a observé qu’au-delà de 30 °C, les tomates ont tendance à s’hybrider plus facilement entre variétés. En effet, les fleurs développent un pistil plus long qui facilite la réception du pollen extérieur, tandis que le pollen de la plante devient moins fonctionnel.

Méthode pour récupérer la semence

Pour faire de la semence à partir de 30 kg de tomates, il faut compter environ 5 à 6 heures de travail. Karim travaille avec trois variétés qui sont bien adaptées à son climat : la Noire de Crimée, la Miel du Mexique et la Cœur de bœuf orange.

  1. Il commence par récolter les premières tomates situées en bas des plants, car elles donnent en général les graines de meilleure qualité. Pour 30 kg de tomates cerises, il faut environ 3 à 4 heures pour sélectionner les bons fruits. La sélection se fait aussi en fonction des plants qui montrent de bonnes qualités, comme la résistance à la sécheresse ou une bonne vigueur.
  2. Une fois les tomates récoltées, il les lave dans un grand bassin, ce qui prend environ 30 minutes pour 30 kg. Ensuite, il coupe les tomates en deux. Il récupère les graines à la petite cuillère. Pour les cœurs de bœuf, cette étape est plus longue, même s’il ne connaît pas le temps exact. Pour les tomates cerises et les Noires de Crimée, il faut environ une minute par tomate.
  3. Les graines et la pulpe sont mises dans une grande passoire. Il écrase la pulpe avec une spatule pour faire tomber le jus et les graines, tandis que la chair reste dans la passoire. Selon la variété, il peut aussi ajouter un peu d’eau dans la passoire pour aider les graines à descendre.
  4. Les graines sont ensuite mises dans un bol avec de l’eau. Celles qui flottent doivent être enlevées, car elles sont stériles (elles n’ont pas d’embryon). Cette étape prend en moyenne 5 à 10 minutes.
  5. Il laisse ensuite le bol dans un endroit ombragé et bien ventilé, de préférence un endroit où il passe régulièrement pour ne pas oublier. Après deux jours, un champignon blanc se forme à la surface. C’est normal : ce champignon se développe sur la pellicule qui entoure la graine. Il aide à la détruire, ce qui facilite ensuite la germination. Quand le champignon est présent, on peut retirer les graines pour l’étape suivante.
  6. Bocal de semence de blette auto-produite. Sur l'étiquette, Karim précise la quantité de semence et parfois l'état des fruits quand il les a récoltés.
    Les graines sont ensuite nettoyées à nouveau dans une passoire, ce qui prend une dizaine de minutes. Elles sont ensuite mises dans un filtre à café, qu’on égoutte puis qu’on suspend dans un endroit bien ventilé pendant une journée pour les faire sécher. Quand elles sont bien sèches, on peut les mettre dans un bocal ou un sachet avec une étiquette.
  7. Ensuite, les graines sont placées une semaine au congélateur pendant une semaine pour lever leur dormance. Il faut absolument qu’elles soient bien sèches, sinon l’embryon risque de geler et la graine ne sera plus fertile.
  8. Les graines de tomate se conservent dans des bocaux pendant facilement 4 ans.


Remarque : Il note que certaines tomates, comme les cœurs de bœuf, donnent peu de fruits (2 kg cette année). De plus il a aussi constaté que dans certains fruits, toutes les graines ne sont pas forcément matures.

Transformation et valorisation de la pulpe de tomate

Pour valoriser la pulpe extraite lors du processus de filtrage de la semence.

  • Pour la sauce tomate, 30 kg de fruits permettent de produire environ 40 pots d’un demi-litre (20 litres de sauce). La pulpe est cuite avec des herbes, puis mise en bocaux stérilisés.
  • Les bocaux sont remplis à l’aide d’un entonnoir pour éviter les souillures sur les bords.

Conseil et amélioration (prélèvement de la semence et récupération de la pulpe de tomate :

  • Ne pas être seul dans le procédé, car cela peut être long et fastidieux.
  • Être très vigilant à ce que les graines soient bien sèches avant de les mettre au congélateur, afin d’éviter de les stériliser.
  • Il conserve actuellement ses semences dans un placard en métal, ce qui n’est pas idéal. Karim conseille de les garder dans un placard en bois, à l’ombre, au frais, dans une pièce où la température reste stable, pour éviter les deltas de température trop importants. On lui à aussi conseillé d’utiliser un réfrigérateur. Il existe des possibilités de location d’emplacements réfrigérés auprès d’entreprises spécialisées dans la conservation de semences.

Récupération de la semence sur d’autre variété

Karim réalise également des semences de poivrons, notamment la variété Sweet Dream, bien adaptée au climat local. L’extraction est plus simple : on ouvre le fruit, on frotte les graines pour les détacher, puis on les trie par flottaison dans un bol de la même manière que les tomates et on les sèche.

Galerie photo de la ferme de Karim Boutayeb


Cette page a été rédigée dans le cadre du projet Urbane avec le soutien financier de l'Union Européenne, avec la participation du Centre National d'Agroécologie et de Ver de Terre Production