Correction des carences des plantes pour éviter les carences chez les animaux
Le réseau d’éleveurs "Éleveurs autonomes" a mis en place plusieurs types de pratiques avec de bons niveaux d'efficacité. Ces éleveurs sont partis du postulat que les carences soignées chez les animaux par des apports externes (minéral dans l’alimentation) seraient dues à des carences présentes dans les plantes que ces animaux consomment, ils ont alors cherché à les corriger directement dans les parcelles.
Beaucoup de travaux restent à faire de ce côté, et les produits (comme les moyens de contrôle) évoluent très vite. Les "recettes" proposées par les Éleveurs autonomes dans cette page, ne sont pas figées et restent à adapter selon le sol, le pH et l’altitude. Des bandes témoin sont mises en place pour vérifier visuellement l’aspect des plantes et des racines et des analyses foliaires permettront de conforter (ou non) les résultats.
Cette page est une synthèse d’une année d’échanges entre membres du groupe Éleveurs autonomes, constitué par des agriculteurs, des techniciens et des vétérinaires de toute la France. La plupart des agriculteurs sont en semis direct ou souhaitent s’en rapprocher dans l’optique d’améliorer les sols et donc les plantes. Pas mal de choses ont été testées. Certains membres du groupe sont beaucoup plus avancés que d’autres dans ces méthodes mais l’envie d’entraide et de partage est toujours présente, ce qui reste la clé pour continuer de progresser dans ce beau métier.
La mesure du taux de Brix
La mesure du taux de Brix d’une sève de plante, fruit, lait ou tout type de liquide donne une information simple et peu onéreuse de l’état de la source mesurée. Un Brix élevé signifie que la photolyse et la photosynthèse fonctionnent bien. Pour la fauche un Brix élévé (>15) garantit un séchage plus rapide et une appétence / valeur alimentaire plus élevée des fourrages. Le sucre est en corrélation avec la MAT (Matière Azotée Totale) des fourrages.
Les apports réalisables au semis
Voici plusieurs possibilités d’apport en solide dans la trémie ou trémie supplémentaire :
- 15 / 20 kg / ha de CMV (Composé Minéral Vitaminé pour les bovins). A adapter aux carences connues chez soi après analyses de sol et / ou de sève. Sinon un apport minéral type 6.24.6 ou 5.25.5 (phosphore / calcium / magnésium). Composition :
- Zinc : 8 à 10 000 ppm (stimule la germination).
- Cuivre : 1 500 à 2 000 ppm.
- Manganèse : 4 000 ppm.
- Cobalt : 40 mg/kg (besoins pour le métabolisme énergétique + production adp-atp).
- Sélénium : 25 à 35 mg/kg.
- Iode : 150 à 200 mg/kg.
- Vitamine A : 600 000 UI/kg.
- Vitamine D : 150 000 UI/kg.
- Vitamine E : 1 000 UI/kg.
- Les oligo-éléments : Ils seront de préférence sous forme de sulfates. Eviter les chlorures de sodium (NaCl) ou de magnésium (MgCl ) car ils sont hygroscopiques et floculants (risque de bouchage). Trouver un minéral traditionnel qui s’en rapproche ou le faire réaliser selon ses besoins.
- 15 / 20 kg de soufre élémentaire pour favoriser l’enracinement ET corriger un pH élevé du sol (30 kg à l’optimum selon une étude américaine pour diminuer d’un point le pH sur la ligne de semi en semis direct (SD)). Pas efficace en sol alcalin et risque d’assèchement de la ligne de semi suivant certains[1].
- 10 kg de sucre pour favoriser l’alimentation rapide des plantules (si pas d’enrobage ou de passage en plein de mélasse).
- 15 / 20 kg d’EPSO TOP ou équivalent si grosses carences + effet fertilisant. Composition :
- Sulfate de magnésium heptahydraté (MgSO4·7H2O), exprimé en MgSO4 : 49 %.
- Eau de cristallisation (H2O) : 50,9 %.
- K2SO4, CaSO4, KCl, NaCl : 0,1 %.
L’enrobage de semence
La "recette" la plus simple et efficace trouvée pour 100 kg de semence :
- Acides Aminés (AA): 1 L.
- Acide Humique et Fulvique (AHF) : 1 L.
- Mélasse : 1 L.
- EM (micro-organismes efficaces) ou LiFoFer : 1 L.
Pour le séchage, utiliser du lithothamne ou de l’argile. C’est une recette basique qui donne de bons résultats en général. Bien entendu, un essai en pot avant est un minimum. De nombreuses recettes peuvent se trouver sur des pages Facebook dédiées (Thé de compost oxygéné …) ou sur des formations en ligne (sur Ver de terre production notamment).
La relance de la vie du sol et biostimulation foliaire
Le mélange suivant est à appliquer après chaque coupe ou 10 jours après traitements sur céréales pour les relancer.
Attention : Comme les TCA (Thé de Compost Aéré ou Thé de compost oxygéné (TCO)), ce mélange contient des micro-organismes donc est photosensible. Il ne faut donc pas le pulvériser en plein soleil ou après une gelée. Il faut s’assurer d’un minimum d’humidité pour sa survie et d’une température du sol à 12°C à 10 cm à l’optimum de la journée. (Ces conditions sont identiques aux TCA).
- Mélasse : 5 L.
- AHF (Acide Humique et Fulvique ) : 1 L.
- AA (Acides Aminés) : 1 L.
- Bore : 0.5 kg (octaborate de sodium).
- Molybdène : 10 g/t de matière sèche exportée.
- Micro-organismes : 20-25 L.
- Silice : 30 g.
A tester l’ajout de :
- Cobalt.
- 200 L de TCO et moins de LiFoFer (max 4-5 L de LiFoFer pour 1000 L de TCO, soit 1L/ha).
- Jus de lombricompost.
- Extraits frais, ceux que l’on veut ou plusieurs (pour le côté minéral).
Les thés de compost
Faire du "Thé de Compost" (Oxygéné (TCO), mais dire Aéré (TCA) est plus juste) consiste à multiplier des micro-organismes (le plus souvent du compost) dans une eau tempérée (18-22°) tout en lui apportant de l’oxygène, soit par un ou des systèmes de ventilation, ou par un système créant un vortex.
Voir article détaillé :
Selon la durée de la procédure il est possible d’orienter la préparation soit plutôt bactérienne (court) ou fongique (longue). Beaucoup de variantes amélioratrices ou orientées selon les désirs sont possibles avec le choix de différentes matières premières (avec plus ou moins de C/N, origines des composts ou guano) et des ajouts de substances diverses (AHF, AA, algues, souches de bactéries ou de champignons, poudre de plantes…).
Comme pour les enrobages, il est possible de trouver des informations sur Facebook ou en formation avec Ver de Terre Production.
Pour réaliser un TCA de bonne qualité, il faudra utiliser une eau correctement structurée.
Les grandes lignes du désherbage
La réussite des désherbages chimiques réside dans le fait d’arriver à maximiser l’absorption des molécules utilisées par les stomates des plantes. Pour cela, nous vous invitons à lire la page Optimiser l’application d’un herbicide.
La structuration de l’eau par différentes techniques (LM Innovation par exemple) arrive à augmenter l’efficacité des traitements. Plus exactement, elle améliore la conductivité et rend l’eau plus hydratante (avec un effet "gras" qui colle un peu comme un adjuvant type huile). L’absorption en est donc plus élevée ce qui améliore l’efficacité.
Concernant le Glyphosate, il est impératif d’avoir une eau avec un pH faible (4 à l’optimum). L’ajout d’EM peut aider à acidifier la bouillie. Le vinaigre blanc permettra aussi d’abaisser le pH (1 L de vinaigre fait perdre 1 point de pH, cf les travaux d’Eric Petiot) et permet d’en réduire la dureté. Le sulfate d’ammonium permet d’agir sur la dureté de l’eau.
Il faut penser à relier les rampes du pulvérisateur au sol avec une prise de terre (fil de cuivre et/ou chaîne).
La silice
La silice est un minéral souvent oublié mais qui est remis au goût du jour. Elle est indispensable aux plantes et est un élément majoritaire de notre environnement (le second à 26,7% après l’oxygène). Elle constitue notamment un rôle important dans la paille (résistance à la verse) et dans la résistance fongique[2].
Les EM et la LiFoFer
La multiplication de ces solutions peu coûteuses permet d’améliorer nettement les fumiers et lisiers. Constitués à environ 90% d’acide lactique et 10% d’acide acétique, elles permettent de jouer aussi un rôle dans la bonne conservation des fourrages (allant d’1L d’EM / 10 kg de matière verte enrubannée pour certains, à 1 L / m3 d’ensilage tassé pour d’autres, soit souvent la capacité max de l’ensileuse).
Il est estimé, par analyse chromatographique, que plus de 200 micro-organismes seraient présents dans une LiFoFer avec par exemple des trichodermas, nématodes, amibes, rotifers…
Ceux qui ont essayé ne reviennent pas en arrière. Des analyses réalisées chez un membre du groupe "Éleveurs autonomes" ont montré une efficacité similaire voire meilleure aux produits de type Bactériolit.
Mais pour les éleveurs, la meilleure façon de les utiliser est qu’ils soient ingérés par les animaux et qu’ils se retrouvent dans leur système gastrique. Ainsi, ils concurrenceront les pathogènes, seront dans un milieu favorable pour se multiplier et seront épandus naturellement via les excréments.
En système céréalier, mais aussi en prairie, il est possible d’en apporter comme dans la "recette" de biostimulation (cf: La relance de la vie du sol et biostimulation foliaire) à raison de 20 à 25 L / ha. En apport par fissuration, on entend souvent parler de 60 L/ha. Données à peaufiner par d’autres essais chez vous, n’hésitez pas à partager vos retours dans la zone de commentaire en bas de page !
Les EM
Les microorganismes efficaces sont disponibles à la vente (Multikraft, Agriton,... en solution mère à multiplier soi-même ou en produit prêt à l’emploi). Pour avoir un tarif avantageux, l'achat d’une solution mère EM-1 est nettement plus intéressante.
Voici comment la multiplier ensuite :
- Avoir un IBC de 1000 L, soit équipé d’une couverture chauffante ou d’un fond chauffant (voir chez OPALE équipement ou autre) ou avec des résistances d’aquarium. A noter que certains y arrivent très bien l’été en mettant simplement un IBC noir au soleil.
- Mettre 970 L d’eau non chlorée (et dynamisée si possible) à la température de 30-34°C. Mélanger 1 L d'inoculant EM-1 avec 30 L de mélasse de canne à sucre non soufrée et 3kg de sel de mer (Guérande).
- Bien fermer l’IBC de façon étanche mais avec un système d’évacuation d’air contrôlé (le principe de syphon fonctionne très bien et permet de passer le fil de sonde de température.)
- La fermentation est finie quand le pH atteint 3.5. Le temps est assez variable, de 24H avec une eau dynamisée, jusqu’à 10 jours en conditions moins optimum. Le produit se conserve sous vide d’air dans l’IBC jusqu’à 1 an (à l’abri de la lumière et protégé des variations de température).
Si le pH n’est pas bon, la préparation est ratée.
A noter que certains remettent en fermentation la cuve avec un reste de solution. Quand il ne reste que 100 L, remettre 900 L d’eau (toujours dans un système à 30°C ou au soleil l’été) + mélasse et sel. Vérifier le bon fonctionnement par mesure du pH. Cette solution ne garantit pas d’avoir autant de diversité qu’avec les EM-1 mais le contraire n’est pas prouvé non plus.
La LiFoFer
Les EM sont généralement produits loin de chez nous. Pour assurer une production de microorganismes adaptés à notre biodiversité locale, certains agriculteurs ou entrepreneurs ont repris des travaux provenant d’Amérique du Sud qui permettent de produire de la LItière FOrestière FERmentée (LiFoFer). Pour en apprendre plus sur le sujet, nous vous invitions à consulter cette page :
Vous pouvez aussi acheter les produits prêts à l’emploi chez des fabricants (REZOMES…).
Retrouvez une partie des pratiques évoquées dans cette page, dans cette vidéo d'Alain Baty :
Pour aller plus loin
Pour en apprendre plus sur comment améliorer la santé des ruminants par leur alimentation, nous vous invitons à lire cette page :
Sources
Cette page est une synthèse d’une année d’échanges entre membres du groupe "Éleveurs autonomes", constitué par des agriculteurs, des techniciens et des vétérinaires de toute la France. Elle a été réalisée par Alain Baty.
Annexes