Portrait de ferme d'Hubert Charpentier (Brives, 36)
Ingénieur CIRAD, Hubert Charpentier a travaillé au développement de systèmes agricoles basés sur les SCV sous les tropiques (Madagascar, Brésil)
De retour en 2006 sur la ferme familiale en champagne Berrichonne, il met en pratique ses connaissances en les adaptant au contexte local.
Contexte de la mise en œuvre
Contraintes à la mise en place du SD dans son contexte (pour lesquelles il a dû mettre en œuvre des stratégies d’adaptation) :
- Les mulots
- Les limaces et escargots blancs
- Faims d’azote en début de cycle
- Réchauffement du sol au printemps
- Difficulté de maîtrise du colza en SD après blé
La culture la plus aléatoire était le colza en précédent blé (SD au Semeato TDNG 4.20m dans de gros volume de paille) : problèmes de limaces donc de régularité du peuplement et problèmes de faim d’azote.
Le colza est donc maintenant systématiquement implanté après une légumineuse à graine (lentille ou pois d’hiver).
Rotation jusqu’en 2012
Il a construit sa rotation sur le schéma 2/2 (2 cultures dicotylédones puis 2 céréales). Les couverts d’interculture sont semés en SD juste après la moisson dans un chaume récolté haut (30 cm).
Les niveaux de rendements moyens sur l’exploitation sont dans la fourchette haute du secteur : 40q/ha en colza, 75 en blé tendre et 65 en blé dur.
Pour éviter de semer des couverts en été (période délicate), il a testé l’introduction de couvert pérenne de légumineuse et notamment la luzerne, adaptée dans son contexte pédologique.
Après plusieurs tests, il a callé un système qui intègre une luzerne en couvert permanent :
La luzerne est semée en même temps que le colza au Semeato, dans des résidus de légumineuses (peu de pailles en surface et reliquats azotés élevés). Date de semis : première quinzaine d’août.
- Pas d’anti-dicots à l’automne (le SD diminue la levée des dicots)
- Anti-graminées racinaire systématique (propyzamide : lutte contre la vulpie)
- En cas de besoin : gestion de la luzerne au printemps avec LONTREL (clopyralid)
Il faut noter que la densité de luzerne est volontairement faible, cela participe à la moindre concurrence sur les cultures principales (à titre d’exemple dans notre contexte : la luzerne semée à 25 kg/ha au printemps sous tournesol peut devenir très concurrentielle en année sèche, à l’inverse la luzerne porte graine semée autour de 3 kg/ha sous tournesol est rarement concurrentielle).
La luzerne est installée à la récolte du colza et elle redémarre pour couvrir le sol tout l’été. Le blé tendre qui suit est semé en SD dans la luzerne (application de glyphosate arbitrée en fonction de la flore présente dans la luzerne au semis du blé).
La luzerne entre en dormance durant l’hiver, elle n’est donc concurrentielle pour le blé à ce moment-là.
- Dans le blé : Isoproturon appliqué à l’automne
- Pas d’anti-graminées foliaire au printemps
- Gestion des dicots (notamment les gaillets) pendant la dormance de la luzerne
- Gestion de la luzerne au printemps avec produits anti-dicots type ALLIE (metsulfuron-méthyle) ou avec des hormones. L’objectif est de freiner la luzerne assez tôt pour qu’elle ne concurrence pas le blé mais qu’elle soit capable de repartir après la récolte. A ce moment la luzerne a presque 2 ans, elle est donc déjà bien installée.
En 2013, le blé tendre a rendu 80 q/ha (rendement placette) pour 140 unités d’azote minéral (résultats pesés par son CETA de Champagne Berrichonne et par Arvalis)
Variétés : mélange variétal unique pour toute la sole de blé tendre (5 variétés) qui est ressemé d’année en année. Le but est d’obtenir un mélange variétal adapté à ses conditions de sol et de conduite des cultures. Lorsqu’une nouvelle variété semble intéressante, elle est intégrée à hauteur de 20% dans le mélange.
Lors de la visite fin janvier, la luzerne est complètement en dormance : aucune feuille verte n’est visible, on distingue seulement les tiges séchées de la pousse estivale.
Un couvert de sorgho estival est semé dès la récolte du blé dur (chaume coupé haut), le pois est ensuite semé en SD dans ce couvert.
En résumé : des cultures en bon état, un système callé et optimisé, des charges opérationnelles maitrisées pour des rendements corrects et stables : des idées à transposer !
Annexes
Matériels évoqués dans ce retour d'expérience
Bio-agresseurs évoqués
Sources et références
- Source : Agrodoc : Voyage d'étude SCV par Marie-José Blazian et Sylvain Hypolite https://www.agrodoc.fr/public/ProjetCETA/download.php?id=38