Réconcilier autonomie et biodiversité dans les plaines du Santerre

De Triple Performance
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Dans la Somme, Gonzague Proot transforme progressivement son exploitation céréalière familiale en un système diversifié, autonome et ancré dans la transition agroécologique. Grâce à l’introduction d’un troupeau de Salers, à la plantation de milliers d’arbres et à l’usage du miscanthus pour le chauffage, sa ferme associe innovation sobre, bon sens paysan et cohérence systémique.

Fiche d’identité

  • Exploitation : La Ferme du développement durable .
  • Localisation : Herleville et Rosières-en-Santerre, Somme.
  • Date d’installation : 1997.
  • UTH : 1.
  • SAU : 300 ha (dont 140 à Herleville).
  • Productions annuelles : Polyculture céréalière, légumes plein champ, élevage allaitant Salers.
  • Cahier des charges : Agriculture Biologique.
  • Commercialisation : Vente directe, AMAP, collectivités, livraisons à domicile.

Contexte de la mise en œuvre

Après avoir repris l’exploitation familiale en 1997, Gonzague Proot entame un virage progressif vers l’agriculture durable. La conversion en bio d’une partie de la ferme, la diversification des cultures et l’introduction d’un troupeau rustique visent à réduire la dépendance aux intrants et à restaurer des équilibres agroécologiques. Le redécoupage parcellaire, les haies, et le recours à une énergie renouvelable illustrent cette volonté d’intégrer les dimensions environnementales, économiques et sociales.

Mise en place

La transformation s’est faite par étapes. En 2007, Gonzague implante 3 ha de miscanthus, utilisé dès 2009 pour alimenter une chaudière à bois qui chauffe la ferme et huit logements sociaux. En 2010, il convertit les 140 ha de Herleville en Agriculture Biologique. Un troupeau de 20 vaches Salers est introduit pour fertiliser naturellement les cultures et renforcer l’autonomie fourragère. Les parcelles sont redécoupées pour rompre avec les effets du remembrement, et 5 km de haies sont plantés en 2015 avec des bénévoles. L’hiver, les vaches sont logées dans une Round House, bâtiment circulaire semi-ouvert favorisant le bien-être animal, la lumière naturelle et des manipulations facilitées. L’exploitation fonctionne avec peu de main-d’œuvre fixe, mais bénéficie d’une organisation souple et réfléchie.

Résultats

La ferme affiche une très faible consommation de carburant (135 l/ha/an) grâce à une stratégie de sobriété énergétique bien pensée. Le chauffage autonome par miscanthus a permis de sortir des énergies fossiles dès 2009. La diversification culturale (céréales, légumes, sarclées, oléoprotéagineux) permet de mieux gérer les risques économiques et agronomiques. Le redécoupage parcellaire, combiné aux haies, contribue à restaurer les continuités écologiques et à améliorer la régulation naturelle des bioagresseurs. Les débouchés sont multiples, limitant la dépendance à un seul canal de vente.

Bilan

Le système conçu par Gonzague Proot illustre une transition réussie vers un modèle résilient, autonome et cohérent. Chaque choix technique ou organisationnel (haies, troupeau, chaudière, circuits courts) participe à renforcer l’ensemble du système. La présence d’un bassin de consommation proche est un atout pour valoriser la production localement, malgré l’isolement technique dans une zone encore dominée par l’agriculture intensive. Le modèle repose fortement sur la polyvalence et la disponibilité de l’agriculteur, qui travaille souvent seul hors saison.

Perspectives

L’exploitation est aujourd’hui un exemple de ferme du développement durable, alliant biodiversité, autonomie énergétique, bien-être animal et valorisation locale. Inscrite dans le programme « Nature 2050 », elle poursuit ses efforts pour enrichir ses écosystèmes. Le témoignage de Gonzague souligne l’importance du bon sens et de la connaissance du passé dans l’innovation agricole. Le modèle mis en place pourrait inspirer d’autres fermes du nord de la France souhaitant sortir des impasses de l’intensification, à condition d’en adapter les leviers au contexte local.

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