Sylvopastoralisme

De Triple Performance
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Sylvopastoralisme.jpg Parcours arborés, prairies arborées, ombre, fourrage

SylvopastoralismeParcours arborés, prairies arborées, ombre, fourrageSylvopastoralisme.jpg

L’agroforesterie est l’association d’arbres et de cultures ou d’animaux sur une même parcelle, en bordure ou en plein champ. Les objectifs de ces systèmes de culture sont une meilleure utilisation des ressources, une plus grande diversité biologique et la création d’un microclimat favorable à l’augmentation des rendements.

Cette page portail propose un tour d'horizon des applications à l'élevage (de ruminants, porcins, volailles...) pour cet ensemble de pratiques.

Thématiques

Intérêts et objectifs

Le but de cette pratique est d’offrir une protection ainsi qu’une production et des ressources supplémentaires tout en gardant les milieux ouverts et entretenus par l’utilisation du pâturage comme moyen de gestion des espaces.

L’arbre favorise le bien-être animal tout en offrant un gain économique. Le feuillage en vert ou en sec est un très bon complément alimentaire tout comme les fruits et fleurs. A savoir qu’un animal protégé par les arbres et donc non stressé par les aléas climatiques concentrera son énergie pour la production de lait, d’oeufs ou pour prendre de la masse. Au contraire, si aucun abri n’est à disposition, il devra utiliser son énergie pour se réchauffer ou se refroidir, au détriment de la production.

Mangeoire à canards sous les noyers. Crédit photo : AP32.
Moutons pâturant sous les noyers. Crédit photo : AFAF.

Le sylvopastoralisme englobe une grande diversité de situations, de formes et de paysages, utilisés par des élevages et occupés par des ligneux : des animaux associés à des arbres. La présence d'arbres dans les parcelles peut également fournir de nombreux services spécifiques à l'élevage comme par exemple :

  • La production de fourrages ligneux, qui permettent de diversifier la ration des animaux et de compenser le manque d'herbe en fin d'été pour les ruminants[1]. Il est important de sélectionner des espèces avec une bonne appétence pour un affouragement optimal. Pour les bovins on considère souvent le troène, le fusain, le prunellier, le châtaignier, l'érable, le frêne, le robinier faux acacia, l'aulne et le saule comme des essences utilisables[2].
  • La contribution au bien-être animal, notamment via la création de parcours (arborés ou arbustifs) dans les élevages aviaires de plein air, ou de zones ombragées dans les prairies pâturées. Ces aménagement peuvent même parfois compléter la ration des animaux, avec par exemple des baies et des populations naturelles d'insectes pour les volailles ou des glands pour les porcins.
  • La valorisation de la biomasse ligneuse, via la production de bois plaquette qui peut fournir une litière de meilleure qualité que la paille pour un coût plus faible et moins fluctuant[3].

Des "surfaces" agropastorales

La pratique concerne tous types de surfaces pâturées occupées par des ligneux, qu’elles soient agricole, forestière, ou "naturelle". Elles supportent des espaces mixtes, "agro-naturels", présentant des densités de ligneux très hétéroclites :

  • Des surfaces ouvertes et en partie occupées par des ligneux : alignements, haies, broussailles, fourrés, bouquets, bosquets … intraparcellaires ; … pour partie inaccessibles.
  • Des surfaces semi-ouvertes occupées par un arbrement diffus : forêt clairsemée, boisement épars, (dont noyeraies, châtaigneraies, chênaies, oliveraies …), pré-bois et pré-vergers, matorral de type maquis ou garrigue méditerranéens, causse arbustif ou arborés, lande et lande arborée.
  • Des surfaces couvertes de ligneux, "fermées" : fourrés et sous-bois, landes, maquis, espaces forestiers et vergers relativement denses, pâturés.


Ces techniques permettent d'avoir des espaces :

  • Qui valorisent des milieux hostiles (trop sec, maigres, humides …).
  • Polyvalents, utilisés à plusieurs fins.
  • Hétérogènes et diversifiés.
  • Polyfonctionnels, car ils existent (sont entretenus et maintenus) du fait d’une valorisation économique et agricole tout en présentant des intérêts écologiques et environnementaux.

Les grands aménagements agroforestiers en élevage

Outre la grande diversité d'objectifs, l'association entre arbre et élevage peut également prendre une grande diversité de formes, qu'il convient d'adapter selon les typicités locales et les intérêts recherchés.

Haies

Les haies et talus arborés ou arbustifs sont l'un des aménagements agroforestiers les plus courants. Ils peuvent servir à délimiter les pâtures ou surfaces cultivées dans les bocages, ou bien de source de fourrage additionnel, voire encore de brise vent pour les parcelles cultivées. Comme tous les aménagements agroforestiers, elles constituent une niche écologique supplémentaire et renforcent la continuité des milieux, permettant ainsi de favoriser la biodiversité.

Aménagements intra-parcellaires

Parcours pour les poulets. Crédit photo : Ferme en Coton.
Elevage de porcs agroforestier. Crédit photo : La ferme en Coton.

À l'intérieur des parcelles, l'implantation et l'entretien d'arbres peut avoir un intérêt principalement paysager, c'est notamment le cas des arbres isolés, bordures de ruisseau et bosquets. Comme pour le cas des haies, ces derniers peuvent apporter un refuge ou une source de nourriture aux animaux.

Cependant, il existe des aménagements plus conséquents portant un réel objectif de production : les vergers dont les surfaces au sol peuvent être cultivées ou pâturées (on parle alors de "vergers haute tige") ainsi que les rangées d'arbres destinées à la production de bois d'œuvre ou de bois raméal fragmenté. De telles structures sont parfois utilisées pour faciliter la mise en place de paddocks notamment pour le pâturage tournant dynamique.

Les parcours sont un autre exemple d'aménagement intra parcellaire, très répandus dans les élevages de volailles et parfois de porcins. Ils permettent de limiter le stress des animaux en leur offrant des espaces couverts qui protègent des intempéries, de l'ensoleillement ou de la prédation des rapaces. De fait, ils garantissent une plus grande exploration et occupation de la parcelle : il en découle une meilleure utilisation des ressources nutritives, ainsi qu'un affaiblissement du risque parasitaire (car les déjections sont plus éparpillées). [4]

Sylvopastoralisme et éco-pâturage

Le Sylvopastoralisme est un mode de gestion durable d'un milieu forestier, entretenu par le pâturage (souvent de petits ruminants : ovins et caprins). Il permet de valoriser la diversité de ressources fourragères sous les arbres, et ainsi d'éclaircir la forêt : favorisant la production de bois et réduisant l'éventuelle propagation d'incendies.

On peut aussi mentionner l'éco-pâturage au sens large comme association entre agroforesterie et élevage, notamment lorsque des animaux sont introduits dans certaines surfaces productives, comme des vergers, pour les entretenir et réguler les bioagresseurs.

Gestion des arbres et des surfaces

  • Protéger les arbres des animaux par une clôture électrique ou grillagée.
  • Protéger les arbres par des gaines simples, mixtes et d’agroforesterie, renforcées ou non. D’une hauteur de 60 cm contre le lièvre et le lapin, 120 cm pour le chevreuil, 180 cm pour le cerf et pour un minimum 14 cm de diamètre (selon le type d’arbre). Un diamètre plus large est à prévoir pour un fruitier (pose d’un sur tronc).
  • Eviter de laisser aux animaux un accès aux arbres sous risque de dégâts causés aux racines, d’arbres abimés voire déracinés les premières années.
  • Prévoir un écartement suffisant entre les lignes et les arbres permettant le passage des engins pour la restauration du parcours et le semoir (environ 2 à 8 m) et une tournière suffisante pour leur retournement. Soit un écartement d’environ 12 à 24 m en moyenne entre les lignes de plantation.
  • Allier plusieurs formes d’éléments arborés pour une efficacité optimale : Haies + alignements par exemple.

Adaptation selon l'élevage

Elevage de volaille

Les arbres ont un vrai rôle dans l’optimisation de l’utilisation du parcours et dans la diversification alimentaire des volailles : 10% de l'aliment ingéré par jour.

Les volailles sont des animaux craintifs qui ne s’aventurent pas ou peu sur un terrain qui n'offre aucun abri contre les prédateurs, particulièrement aériens. Pour cela, quelques préconisations :

  • Des peignes, placés à la sortie des bâtiments, sont des haies basses positionnées de façon à rassurer et orienter les animaux vers le reste du parcours.
  • Les alignements, fruitiers ou champêtres, souvent positionnés après les peignes offrent une protection et incitent les volailles à se déplacer et se diviser en plusieurs groupes, réduisant ainsi les risques de propagation de maladies par concentration d’animaux sur un même espace. Les arbres permettent également de les protéger des aléas climatiques.
  • Allier plusieurs formes d’éléments arborés pour une efficacité optimale : Peignes + haies ou alignements ; peignes + bosquets ou boisements clairs.
  • Protéger les arbres des volailles par une protection spécifique (grillage à petites mailles ou gaines).
  • Attention au choix du paillage : si c'est de la paille ou des copeaux de bois, penser à interdire totalement l’accès aux animaux en déportant la clôture et protéger l’arbre par un grillage.

Elevage porcin

Le pâturage des porcs en sous-bois (sylvopastoralisme) ou sur prairie arborée est une pratique traditionnelle d’élevage extensif. Il s’agit du système d’élevage agroforestier le plus simple et le moins coûteux à mettre en place. Un bon équilibre entre prairie et bois est toutefois primordial pour tirer le meilleur parti de ces espaces et ne pas les dégrader. Quelques préconisations :

  • Favoriser les arbres fruitiers ou champêtres à fruits comestibles pour les porcs (châtaigniers, pommiers, poiriers, chênes...).
  • Il est plus aisé de positionner des arbres et de gérer les existants sur les contours des parcelles ou, sous forme de lignes alignées non pâturées, car les parcours doivent être renouvelés mécaniquement régulièrement. Des arbres isolés rendent la gestion des parcours plus difficile.
  • Il est possible de limiter les dégats causés au sol et aux arbres en raisonnant le temps de pâturage et la durée de rotation sur les parcours.
  • Protéger les arbres des animaux par une clôture déportée sur des piquets de 80 à 120 cm de hauteur (hors-sol) :
    • Clôture électrique (recommandée) : 2 fils parallèles électrifiés (à 80 cm des arbres minimum).
    • Clôture grillagée dans la cas d'une protection des arbres isolés ou de bouquets d’arbres.

Elevage bovin/équin/ovin/caprin

Protection des arbres et des espaces :

  • Clôture déportée sur des piquets de 120 à 180 cm de hauteur (hors-sol) :
    • Electrique (recommandée pour les gros ruminants et herbivores) : 2 fils électrifiés déportés de 1 à 1,5m de l’arbre.
    • Grillagée (type ursus), déportée de l’arbre de 1 à 1,5m.
  • Il est important de ne pas sur-pâturer les prairies pour éviter le tassement des racines proches des arbres. Il est conseillé de fonctionner sous forme de pâturage tournant ou de raisonner le temps de rotation pour optimiser les pâtures et l’affouragement direct sur les arbres.
  • Les gros herbivores ont tendance à se gratter assez rudement aux arbres et aux piquets non électrifiés, causant ainsi des dégâts plus ou moins importants à l’arbre. Il faudra prévoir des «grattoirs» (arbres morts, branches, piquets isolés voire brosses spéciales) pour limiter les dégradations.
  • Les caprins et ovins ont l’habitude d’écorcer les arbres tandis que les équidés sont amenés à les ronger, par ennui ou manque de minéraux, il faudra vérifier les protections et clôtures très régulièrement.
  • Les élevages de grands herbivores ont souvent lieu sur des prairies temporaires qui peuvent être transformées en cultures. Il faudra veiller à adapter l’écartement aux engins agricoles en place et à prendre en compte les projets futurs pour les parcelles.
  • La taille sous forme de têtards bas est envisageable quand la volonté est d’affourager les animaux par ce biais, (tables d’affouragement). Les animaux pourront directement se servir sur les extrémités du branchage de l’arbre. Il est conseillé de garder une clôture empêchant l’accès total à l’arbre dans ces cas là pour ne pas que l’arbre soit totalement brouté.

Attention au choix des essences d'arbres

  • Favoriser les arbres fourragers (mûriers, frênes,...), fruitiers ou champêtres à fruits comestibles.
  • Le fruit des érables est mortel pour les chevaux, il faut donc éviter leur plantation dans des prairies déstinées à la pature d’équidés.

Bénéfices

  • Effet bioclimatique : apport d’ombrage et de fraicheur en été, diminution de la baisse de température en hiver, protection au vent des animaux.
  • Une ressource alimentaire supplémentaire et complémentaire : feuilles, fleurs, bourgeons, glands, châtaignes et autres fruits, insectes, vers de terre, une herbe plus verte et riche en minéraux et acides gras, un fourrage d’appoint pour les sécheresses, des périodes de patûrage allongées (sécheresse ou humidité moins impactantes), une précocité fin d’hiver pour l’herbe. Stocké pour l’hiver, le feuillage sec de frêne, de mûrier ou d’orme est souvent l’égal de la luzerne ou du sainfoin. Les   fruits   (glands,   noisettes, châtaignes, faines,  etc)  peuvent également  régaler  les animaux  et auraient (pour certains d’entre eux) des effets anti-parasitaires. Faire sortir les animaux permet de diminuer le gaspillage alimentaire.
  • Soigne certaines maladies et parasites (automédication par affouragement sur les feuilles ou fruits).
  • Un sol moins boueux et plus portant plus longtemps.
  • Véhiculer une image valorisante.
  • Une meilleure qualité nutritionnelle des produits animaux.
  • Le bien-être animal favorisé grâce à la création d’un microclimat (protection contre vent, pluie, soleil direct, humidité, chaleur) et d’un cadre naturel faciliant la liberté de mouvement, les interactions sociales et l’utilisation des pâtures et parcours.
  • Moins de dépenses alimentaires, sanitaires et pour la régulation de la température des bâtiments d’élevage.
  • Diversification des productions (fruits, fourrage, bois).

Contraintes et limitations

Bien que les applications de l'agroforesterie à l'élevages soient nombreuses et variées, il demeure un certain nombre de points de vigilance de portée globale :

  • Dans les vergers il faut prêter attention et retirer les animaux un mois avant et après les récoltes, pour éviter qu'ils en consomment une partie, où qu'ils tombent malade en consommant des fruits avariés. Dans la même logique, l'association de l'élevage et l'agroforesterie peut impliquer une nécessité de réduire les traitements phytosanitaires afin de préserver les animaux d'éventuelles intoxications[5].
  • L'introduction d'animaux en système agroforestier peut impliquer la mise en place de protections des arbres, en particulier pour les plus jeunes et les tiges basses[5].
  • La conduite d'arbres dans des systèmes historiquement spécialisés en élevage peut aussi causer certains désagrément comme : l'entrave de certaines opérations mécaniques, la nécessité de se former à de nouvelles compétences, et du temps et de l'argent à investir plusieurs années avant de parvenir à un système agroforestier pleinement productif[6].
  • Chez les plus gros ruminants, certains couverts arborés peuvent engendrer une plus grande "gêne liée aux insectes" malgré un effet globalement positif sur le bien être animal[7].
  • Dans les zones concernées par des problématiques de sécheresse et des sols à faible réserve utile, la concurrence hydrique peut nuire à la productivité des parcelles agroforestières[6].


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Références

  1. Delphine SCOHY, Web-Agri, Des arbres dans la ration des bovins. 2020. https://www.web-agri.fr/fourrage/article/168906/des-arbres-dans-la-ration-des-bovins
  2. Estelle ROPERS, Réussir Agri 53 ; "Pâturage de ligneux, pourquoi pas ?". 2020. https://www.agri53.fr/paturage-de-ligneux-pourquoi-pas
  3. Agr'eau, document technique : Valoriser la biomasse en litière plaquette, 2019. http://agreau.fr/wp-content/uploads/2019/04/agroforesterie-fiche-thematique-utiliser-les-plaquettes-en-litiere-et-valoriser-la-biomasse-elevage-paillage-avril-2015.pdf
  4. C. BÉRAL et al., Guide technique : aménagement arborés des parcours de volailles, 2015. https://www.itavi.asso.fr/content/guide-technique-amenagement-arbores-des-parcours-de-volailles
  5. 5,0 et 5,1 C. Béral et al., AGROOF SCOP, ETAT  DES  LIEUX  DES  PRATIQUES : La place l’agroforesterie dans les élevages  ovins, 2018. http://www.rederural.gov.pt/centro-de-recursos/send/2-agricultura-agroindustria/959-agroforesterie-en-systeme-d-elevage-ovin-etude-de-son-potentiel-dans-le-cadre-de-l-adaptation-au-changement-climatique
  6. 6,0 et 6,1 S. Debarge, ADEME, Réintégrer l'arbre dans les systèmes agricoles, 2015. https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/7-reintegrer-l-arbre-dans-les-systemes-agricoles-reference-ademe-8183.pdf
  7. C. Ginane et M. Bernard, INRAE, Comportement et bien être : impact de la présence d'arbres, 2018. http://www.rederural.gov.pt/centro-de-recursos/send/2-agricultura-agroindustria/959-agroforesterie-en-systeme-d-elevage-ovin-etude-de-son-potentiel-dans-le-cadre-de-l-adaptation-au-changement-climatique

Sources

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