Synthèse d'essais sur le stockage du carbone en ACS
Le stockage de carbone via le semis direct est un sujet qui revient très souvent dans les discussions. Voici un petit tour d’horizon des derniers résultats de la recherche, ainsi que des observations de terrain.
Comment voir des variations anormales ?
Pour voir une variation du taux de matières organiques du sol, la première chose est de bien réaliser le prélèvement d’échantillon pour l’analyse de sol. En dessous de 15 prélèvements dans une zone homogène pour obtenir une seule analyse, l’incertitude augmente trop fortement et fausse totalement les résultats. En voici un exemple ci-dessous. Les variations sont trop fortes pour être uniquement dues aux pratiques agricoles. Il y a donc un défaut de prélèvement, provenant soit d’un échantillonnage trop faible ou mal réparti.
De la même manière, si sur une année on observe une augmentation de 1% de MO sur une parcelle, sans apport extérieur, c’est très certainement lié à une erreur lors du prélèvement. Par exemple, pour monter de 1% de MO un sol en un an sur un hectare, il faudrait amener aux alentours de 150 tonnes de paille.
Qu’est ce qui fait monter le taux de MO des sols ?
Plusieurs facteurs permettent d’augmenter le taux de MO d’un sol, certains liés au climat et à la composition minérale du sol, et d’autres liés au système de culture :
- La présence de racines
- Un ratio C/N bas des résidus
- La présence de vers de terre
- Des conditions humides et froides
- Un taux suffisamment élevé d'argile et de calcium dans le sol
- Apports de MO extérieure (effluents d'élevage, compost, BRF...)
Pour plus d'informations sur ces facteurs :
Et dans un second temps, la baisse voir l’arrêt du travail du sol permettra de réduire la minéralisation et donc de minimiser les pertes de carbone. Mais l’importance de ce facteur est moindre comparée à ceux cités ci-dessus. Si la principale source d’humus des sols provient des racines, on comprend que nos plantes annuelles (couverts et cultures) sont assez peu efficaces, comparées à des espèces de prairies. Petit exemple ci-dessous avec cette comparaison entre une plante annuelle et une plante vivace.
Il a aussi été constaté dans les essais suivis, que la diversité cultivée en simultané permettait de fortement monter le taux de carbone séquestré.
En ACS long terme ça donne quoi ?
Sur les essais long terme suivis, en France et en Suisse, 40 ans d’Agriculture de Conservation des Sols (ACS) n’ont pas ou peu stocké de carbone, mais ont plutôt réorganisé sa répartition sur le profil de sol. Bien que certains remettent en cause la qualité de gestion des parcelles (c’est un débat), les tendances sont là.
Les pistes d’amélioration
En plus de toutes ces vertus, les systèmes en semis direct avec couverts d’interculture ne sont souvent pas suffisants pour stocker du carbone de manière significative. Deux exemples de fortes augmentations :
- Voici la courbe d’augmentation de la matière organique chez Jean-Claude Quillet, depuis ses débuts en semis direct (1996). En plus d’un système ACS, l’augmentation de la MO est en très grande partie due à l’épandage de broyats de déchets verts et de boues de station d’épuration, ce qui a permis de restaurer efficacement les sols.
- Second exemple chez le regretté Hubert Charpentier, où l’on voit une forte différenciation entre les modalités SD et travail du sol. Il n’y a ici pas eu d’apports extérieurs. Une partie de l’augmentation du taux de MO se trouve dans la mise en place de couvertures permanentes vives (lotier, luzerne, trèfle) qui permettent d’entretenir le taux de MO grâce à un très fort tissu racinaire.
Conclusion
Un système ACS sans élevage ou apports de MO exogène stocke très peu de carbone, mais le concentre en surface. Avec le temps, les niveaux finiront par augmenter, mais lentement.
Bien que l’on ne puisse pas agir sur les facteurs comme le type de sol ou le climat, il est possible d’accélérer l’augmentation de la MO des sols, en amenant des matières organiques exogènes, et en intégrant des plantes vivaces dans la rotation.
Il ne faut pas oublier, qu'il est très important de bien réaliser son prélèvement de sol pour obtenir une mesure fiable.
Sources
Cet article a été rédigé grâce à l'aimable contribution de Martin Rollet, ingénieur agronome au Centre National d'Agroécologie.
Annexes