Règlement intérieur pour les sociétés agricoles
Bien que la rédaction d'un règlement intérieur ne soit pas une obligation légale pour toutes les sociétés agricoles, il est fortement conseillé, voire nécessaire dans certains cas, car il s'agit d'un contrat complétant les statuts et définissant le fonctionnement quotidien de la société.
Résumé
- En GAEC, le règlement intérieur est obligatoire pour l'obtention de l'agrément. Il est examiné par la CDOA comité GAEC et doit être fourni avec les statuts et autres documents pour valider la transparence du GAEC.
- Pour les EARL et les SCEA, le règlement intérieur est recommandé, surtout lorsque les associés ont des intérêts individuels distincts, notamment lorsqu'ils ne font pas partie de la même famille.
- Le règlement intérieur définit les règles susceptibles de changements fréquents que les statuts ne peuvent pas prévoir. Cela inclut l'organisation du travail, la répartition des tâches et la périodicité des réunions.
- Il sert à prévenir les mésententes entre associés, notamment entre frères et sœurs ou associés non familiaux.
- Le règlement intérieur est un contrat entre les associés qui a force de loi entre eux, mais il n'est pas opposable aux tiers car il n'est pas publié.
Contenu d'un règlement intérieur
Le règlement intérieur peut couvrir un large éventail de sujets, notamment :
- Préambule: Définition des objectifs communs et de la finalité de la création de la société.
- Fonctionnement de la collégialité: Organisation des réunions hebdomadaires, prise de décision, organisation du bureau commun et répartition des responsabilités.
- Relations financières: Rémunération du travail, prélèvements exceptionnels, dépenses privées, avantages en nature et remboursement des charges.
- Aspect social: Engagements extérieurs, tour de garde, congés et formation.
- Prévision des événements: Maladie, accident, maternité, et désignation d'un conciliateur pour prévenir et gérer les mésententes.
- Modification du règlement intérieur: Modalités de modification, généralement à l'unanimité.
Importance de la mise à jour et des discussions
Il est important de:
- Discuter ouvertement du règlement intérieur entre associés pour s'assurer que tout le monde est d'accord.
- Mettre à jour le règlement intérieur à chaque changement de situation (nouvel associé, changement de statut social) et lors de l'assemblée générale ordinaire pour s'assurer qu'il est toujours appliqué et pertinent.
En résumé, le règlement intérieur est un outil essentiel pour le bon fonctionnement d'une société agricole. Il permet de clarifier les règles du jeu, de prévenir les conflits et de garantir une collaboration harmonieuse entre les associés.
Contexte
La rédaction d’un règlement intérieur dans une société d’exploitation n’est pas une obligation légale. Cependant le règlement intérieur est un contrat qui peut être très utile pour compléter les dispositions des statuts concernant le fonctionnement courant d’une société, notamment le travail en commun des associés.
Le règlement est un contrat qui vaut loi entre les associés, comme les statuts. Par contre, comme le règlement intérieur n’est pas publié, il ne sera donc pas opposable aux tiers.
Le règlement intérieur est nécessaire en GAEC
Les statuts types de GAEC publiés par arrêté ministériel du 24/03/2015 prévoient à l’article 27 la rédaction par les associés d’un règlement intérieur. Pour la demande d’agrément GAEC, les associés complèteront une fiche de demande décrivant la répartition de leurs droits et le fonctionnement de leur travail en commun et fourniront le projet de règlement intérieur à la DDT pour examen par la CDOA comité GAEC. Une fois la création réalisée, les associés fourniront pour valider la transparence de leur GAEC les statuts constitutifs et les justificatifs de publicité légale, mais également divers documents complémentaires tels que les conventions de mise à disposition de biens loués ou en propriété et le règlement intérieur. En cas de modification ou en cas de contrôle de conformité, les associés devront également pouvoir en fournir la dernière version.
Le règlement intérieur est conseillé en EARL et SCEA
Pour les autres sociétés, le règlement intérieur est recommandé quand les associés ont des intérêts individuels très distincts, notamment quand ils ne sont pas de la même famille. À ce contrat complétant les statuts, on donnera le nom de pacte d’associés s’il concerne plus particulièrement les engagements des associés non exploitants, apporteurs de capitaux.
Contenu d'un règlement intérieur
Le préambule
Il ne faut pas négliger l’introduction du règlement intérieur. C’est l’endroit où les associés pourront écrire le « pourquoi ils ont choisi de s’associer ».
Prendre le temps d’écrire leurs objectifs communs et la finalité de la création de la société est très important. Plusieurs années après, si des tensions naissent entre eux, le conciliateur pourra reprendre leurs écrits sur leur projet professionnel, les objectifs économiques qu’ils s’étaient fixés, ou leurs objectifs d’amélioration de leur qualité de vie par exemple.
Le fonctionnement de la collégialité
Les réunions hebdomadaires
Les statuts organisent les décisions des associés en Assemblées générales ordinaire et extraordinaire. Dans le règlement intérieur, il est conseillé de prévoir les réunions quotidiennes ou hebdomadaires des associés exploitants pour organiser leurs agendas et leurs charges de travail. Il est important d’institutionnaliser dès le commencement de l’association un rythme de pause commune et d’échange. Autour d’un café, autour d’un repas, autour d’un apéritif ou autour d’un ordinateur, peu importe, ce qui compte c’est la régularité de ces réunions. Il est conseillé de prendre en note les décisions importantes, d’afficher l’agenda et d’afficher les points importants à faire, ou les prises de décisions qui sont reportées mais à ne pas oublier.
Dans le règlement intérieur, il est aussi possible de s’obliger à inviter à ces réunions et aux assemblées générales d’autres membres participants à l’exploitation, par exemple les aides familiaux ou les conjoints collaborateurs. Auront-ils le droit de participer au débat, auront-ils un droit de vote, et si oui lequel ? Bien que ce ne soit pas toujours souhaitable, il est bon de se poser la question au moment de l’établissement du règlement intérieur pour ne pas avoir de malentendu sur le droit de participer aux réunions des conjoints.
Le bureau
C’est aussi ici qu’il faut envisager l’organisation de votre bureau commun. Où va-t-il être placé ? Y accède-t-on librement (sans passer par la cuisine de l’un des associé) ? Qui a les codes de l’ordinateur ?
La répartition des responsabilités
Bien établir pour commencer la répartition des responsabilités est très important. Chacun des associés sera plus particulièrement responsable d’un atelier de l’exploitation et veillera à son bon fonctionnement.
Répartition des responsabilités | M. | Mme | M. |
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Cultures | |||
Administratif cultures | |||
Elevage | |||
Administratif troupeau et suivi vétérinaire | |||
Trésorerie et comptabilité | |||
Entretien du matériel | |||
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Les relations financières avec la société
La rémunération du travail
L’indemnisation du travail des associés exploitants peut être décidée en assemblée générale ordinaire ou au sein du règlement intérieur. De même pour la rémunération d’un conjoint collaborateur ou d’un aide familial. Le règlement intérieur permet de déterminer les virements bancaires réguliers mis en place pour payer cette indemnisation.
Les prélèvements exceptionnels
Dans le règlement intérieur, on prévoira également les prélèvements réguliers, tels que les prélèvements pour régler un emprunt personnel de rachat de parts sociales. Si les associés sont également gérants, ils peuvent par principe donner un ordre de virement vers un compte personnel sans avoir besoin de l’aval des autres associés. Dans le règlement intérieur, on peut limiter ce droit pour prévenir tout risque de conflit, en montant ou en objet. Il pourra être prévu dans ce contrat que l’associé ne pourra prendre librement de la trésorerie de la société qui jusqu’à … € et sans que cela ne rende la compte de la société débiteur ; et qu’au-delà, il devra en demander l’autorisation aux autres associés co-gérants.
Dépenses privées, avantages en nature et remboursements de charge
Le règlement intérieur prévoira l’avance de trésorerie réalisée par la société pour régler des dépenses privées des associés. Par exemple la cotisation sociale MSA est une cotisation personnelle de l’exploitant. Si la société le règle, ce montant viendra en déduction de son compte courant d’associé en tant qu’avance de trésorerie.
La société peut également avoir une refacturation d’eau, d’électricité, de téléphonie, etc. avec l’un des associés. Il convient dès le départ de clarifier les pourcentages de répartition entre le professionnel et le privé.
Les associés peuvent aussi prévoir des prélèvements en nature d’autoconsommation de leur production.
Le règlement intérieur encadrera aussi le remboursement des frais de déplacements, de bouche, de tenue professionnelle…
La mise en application de ces décisions sera visible dans la comptabilité de la société.
L'aspect social de la société
Les engagements extérieurs
Il est important de clarifier entre les associés leur notion du temps de travail, et leur notion d’engagement extérieur. Les exploitants sont souvent sollicités pour être élu au sein de collectivités territoriales, et des institutions de représentation professionnelle. Bien que cette activié soit gratifiante d’un point de vue intellectuelle, elle l’est souvent peu d’un point de vue financier. Le temps qui est passé à l’extérieur n’est pas passé sur la ferme. Qu’en pensent les autres associés. Quelles sont leurs limites ? Et si l’associé élu était indemnisé de son temps de représentation, doit-il reverser ce montant à la société elle-même pour qu’elle emploie un salarié en remplacement ?
Tour de garde du week-end et jours fériés
Le travail en commun permet de se répartir les tours de garde pour la traite ou la surveillance. C’est son intérêt principal. Il faut donc que les règles du jeu soient clairement établies dans le règlement intérieur pour la réussite de cet objectif de qualité de vie des associés. Ils pourront y déroger, mais le fait qu’une règle soit clairement écrite leur permettra une répartition équilibrée.
Congés
Il faut accompagner les associés dans leur discussion : « c’est quoi pour vous des congés ?! » Pour certains, trois jours d’affilés hors de la ferme suffisent, pour d’autres il faut 1 semaine à la montagne en février et 3 semaines en août + des week-ends quand il fait beau. Et il y a des périodes de réduction de charge de travail sur la ferme plus propice que d’autres. Il est donc crucial que chaque associé ait pu s’exprimer et confronté sa définition des congés avec ses associés, pour ensuite déterminer une règle de prise de congés et de tour de garde cohérente, équilibrée et durable.
Formation
Chacun des associés a le droit de participer à des formations dans l’intérêt de la société et pour son propre développement personnel. Quel est le temps et le budget acceptables pour l’ensemble des associés qui pourront être affectés à ces formations ?
Anticiper et prévoir les cas de maladie, mésentente...
Maladie et accident
En cas de maladie et d’arrêt du travail, il est possible de maintenir l’indemnisation du travail en tant qu’associé exploitant ou de compléter l’allocation maladie reçue par l’associé pour atteindre par exemple 1 SMIC. Il est possible de décider que ce maintien de rémunération sera dégressif dans le temps.
Il est aussi possible de prévoir dès le départ une répartition des responsabilités différentes sur les ateliers en cas de maternité d’une associée, en confiant par exemple plus de tâches administratives temporairement à la jeune maman.
Il peut être intéressant de préciser dans ce contrat la possibilité pour un associé de s’absenter en cas de maladie d’un enfant ou d’un membre de la famille, en prévenant les autres associés, sans que cela n’impacte le bon fonctionnement de leur travail en commun.
Le conciliateur pour prévenir la mésentente
Il est demandé pour obtenir l’agrément GAEC de désigner un conciliateur. La désignation d’un médiateur est également de plus en plus pratiquée dans le domaine professionnel des affaires.
L’article R323-44 du code rural octroie au conciliateur deux missions particulières :
- être consultée dans les cas où les intérêts des associés risquent d'être opposés lors des décisions de l'assemblée générale ;
- concilier les associés sur les litiges survenant entre eux.
Il doit donc prévenir et tenter de guérir. Le conciliateur est une personne de confiance, bénévole, désignée par les associés. Ce peut un membre neutre de la famille, un conseiller ou un juriste de l’organisme accompagnateur ou de la Chambre d’agriculture, un voisin, le maire, le notaire… Evidemment, celui-ci devra accepter cette mission délicate.
Modification du règlement intérieur
Il convient de prévoir les modalités pour modifier le contrat de règlement intérieur. En pratique souvent l’unanimité est requise, puisqu’il s’agit de modifier le contrat social entre les associés. Pas besoin de mettre à jour le règlement intérieur tous les ans, par contre, à l’occasion de l’assemblée générale ordinaire, il servira de support aux discussions des associés sur le fonctionnement de leur vie sociale. Le règlement intérieur devra être mis à jour à chaque entrée d’un nouvel associé, ou changement de statut social, pour intégrer les nouvelles règles de fonctionnement du travail en commun des associés exploitants.
Comment savoir si je suis en conformité ?
Oui | Non | Non concerné | |
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Ai-je signé un règlement intérieur ? | |||
Le règlement intérieur a-t-il été réellement discuté entre les associés ? | |||
Le règlement intérieur est-il toujours à jour, est-il appliqué ? | |||
Tous les ans, en assemblée générale ordinaire,
faisons-nous le point ensemble les réussites et les marges d’améliorations de notre fonctionnement de travail en commun ? |
En cas de non conformité
Si vous êtes en GAEC, le règlement intérieur est une pièce à fournir en cas de contrôle de conformité par la DDT pour l’application de la transparence. En cas de contrôle, il faudra donc rapidement le mettre à jour et le fournir à la DDT pour continuer à bénéficier de la transparence du GAEC. Pour les autres sociétés, le règlement intérieur n’est pas obligatoire, mais il est conseiller pour fixer les bonnes règles du travail en commun des associés. Le plus gros risque, sans règlement intérieur, c’est la mésentente. En fixant les règles de base, une grande partie des difficultés d’entente des associés sont d’ores et déjà écartées.
Références et outils
La version initiale de cet article a été rédigée par Aurélie Brunet.
Dossier agriculture de groupe, GAEC et Sociétés, n° 115, avril 2014, L'autorité, un cadre indispensable au fonctionnement harmonieux...
Dossier agriculture de groupe, GAEC et Sociétés, n° 96, février 2011, Relations entre associés: comprendre et organiser le fonctionnement
Modèles de règlement intérieur dans :
Dictionnaire Permanent entreprise agricole, Editions législatives
Guides juridiques, éditions agricoles, Lamothe
Annexes