Réaliser ses appoints en eau neuve dans un système aquaponique : fiabilité des sources d'approvisionnement
Le succès d’un système aquaponique repose évidemment sur un élément fondamental : l’eau, bien que son besoin soit très faible, sa qualité joue un rôle crucial dans la création d’un environnement sain pour les poissons, les bactéries et les plantes dès son entrée dans cet écosystème. Cet article explore les critères d’une eau neuve de qualité, nécessaire au bon démarrage et au maintien d’un système aquaponique.
Description
Sources / Origines
Qu’elle provienne de la pluie, d’un réseau communal ou d’un forage, les paramètres de l’eau neuve doivent être surveillés attentivement.
L’eau de pluie, bien que gratuite et facilement stockable, présente une grande variabilité de qualité selon les saisons et la localisation. Il est donc préférable de ne pas dépendre exclusivement de cette source pour l’approvisionnement en eau neuve du système. De plus, l’eau de pluie collectée sur les toitures peut contenir des traces de pesticides ou autres résidus indésirables (industrie à proximité, incinérateur, etc.) et à haut risque d’accumulation et d’effet cocktail dans un système très fermé.
L’eau de réseau, quant à elle, contient souvent du chlore et de la chloramine, des agents purificateurs qui sont malheureusement nocifs pour les poissons. Il est fortement recommandé de déchlorer cette eau avant de l’introduire dans le système, en utilisant des techniques comme le dégazage ou des filtres spécifiques (charbon actif, UV, etc.).
La qualité de l’eau de forage varie considérablement en fonction de la localisation et de la profondeur du forage. Une analyse approfondie de cette eau est indispensable pour détecter d’éventuelles contaminants et évaluer sa compatibilité avec le système aquaponique. Pour s’assurer de la qualité de l’eau prélevée et des dispositifs de purification voire de potabilisation à prévoir (si utilisation en transformation), il est recommandé de se rapprocher d’un laboratoire agréé.
Analyses / Paramètres
Pour effectuer ces analyses, nous vous recommandons de vous adresser à l’un des nombreux laboratoires agréés pour le contrôle sanitaire des eaux. L’analyse doit couvrir trois volets essentiels : physico-chimique, bactériologique et phytosanitaire.
L’eau neuve doit respecter les seuils de tolérance de l’espèce élevée, l’élevage étant le compartiment le plus sensible pour la qualité de l’eau dans un système aquaponique. Notons que les seuils de tolérance varient fortement d’une espèce à l’autre, et qu’il conviendra ensuite de les vérifier dans l’eau recirculée.
En parallèle, elle doit également se conformer aux seuils définis par la Directive Cadre sur l’Eau (DCE).
Les tableaux suivants donnent une indication des valeurs à respecter.
Sur le volet physico-chimique :
| Paramètres | Seuils de tolérance en aquaculture (Espèces sensibles) | Seuils eau neuve / cat. A |
| pH | 6,5 à 8,5 | – |
| EC | < 800 µS/cm | 180 à 1000 µS/cm |
| T°C | < 25°C | – |
| DCO (demande chimique en O2) | <60 mg/L | – |
| Matières en suspension | <15 mg/L | <25 mg/L |
| Turbidité | <2 FNU | – |
| Dureté | 10 à 30 °f | – |
| Titre hydrotimétrique | 10 à 30 °f | – |
| Titre alcalimétrique | 10 à 30 °f | – |
| Potentiel Redox | +200 à +400 mV | – |
| CO2 dissous | <4 ppm | – |
| Azote ammoniacal | <1,5 mg/L | <100 mg/L |
| Nitrites | <0,3 mg/L | <0,5 mg/L |
| Nitrates | <100 mg/L | <50 mg/L |
| Orthophosphates | 40 à 60 mg/L | 0,5 mg/L |
| Bore | 1,5mg/L | |
| Potassium | <10 mg/L | 0,25 mg/L |
| Chlorures | <0,003 mg/L | – |
| Sulfates | <50 mg/L | 250 mg/L |
| Calcium total | 40 à 80 mg/L | – |
| Magnésium | <15 mg/L | – |
| Sodium | <30 mg/L | 200 mg/L |
| Fer | <0,05 mg/L | <0,2 mg/L |
| Manganèse | <0,01 mg/L | 0,05 mg/L |
| Plomb | – | <10 µg/L |
| Mercure | – | <1 µg/L |
| Arsenic | – | <10 µg/L |
| Chrome | – | <25 µg/L |
| Nickel | – | <20 µg/L |
| Cyanure | – | <10 µg/L |
| Cadmium | – | <5 µg/L |
L’analyse bactériologique :
| Paramètres | Seuils en aquaculture | Seuils eau neuve / cat. A |
| Bactéries coliformes | 0 UFC/100mL | 0 UFC/100mL |
| Escherichia coli | <250 UFC/100mL | 0 UFC/100mL |
| Entérocoques intestinaux | 0 UFC/100mL | 0 UFC/100mL |
| Salmonelles | 0 UFC/100mL | 0 UFC/100mL |
| Bactéries anaérobies sulforéductrices | 0 UFC/100mL | 0 UFC/100mL |
L’analyse de pesticides :
| Paramètres | Seuils en aquaculture | Seuils eau neuve / cat. A |
| Produits phytosanitaires sur fraction dissoute (e.g. Atrazine, Bromacile, Fluroxypyr…) | – | <0,1 µg/L |
| Glyphosates et dérivés (e.g. Glyphosate, AMPA…) | – | <0,1 µg/L |
| Multirésidus de pesticides (e.g. Aldrine, Dieldrine, Heptachlore…) | – | <0,03 µg/L |
Vous l’aurez compris, l’eau entrante, bien que nécessaire en très faible quantité (souvent proche d’un apport quotidien de 5 à 10% du volume d’élevage), doit être d’une qualité irréprochable. Dans les systèmes aquaponiques en circuit fermé, même de petites quantités de contaminants peuvent s’accumuler avec le temps, entraînant des niveaux nocifs de particules et de substances chimiques. Si des pesticides ou autres polluants pénètrent dans le système, cela pourrait avoir des conséquences désastreuses, non seulement sur la productivité de votre installation mais aussi sur la sécurité des produits destinés aux consommateurs finaux.
Assurer une eau neuve de haute qualité dès le départ est donc crucial pour éviter la formation d’un cocktail toxique dans l’eau de vos circuits. En adoptant des pratiques rigoureuses de surveillance et en installant un dispositif de traitement de l’eau adapté à ses origines et leurs paramètres, vous protégez la santé de vos poissons et de vos plantes, tout en garantissant une production alimentaire sûre et durable.
Annexes
