Concilier autonomie, EBE et qualité de vie en élevage laitier (Gaec Lusanbio à Lusanger)

De Triple Performance
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C’est avec une facilité déconcertante que Yannick Allard (54 ans) nous montre que concilier revenu et qualité de vie c’est possible. Avec ses 2 associés (Stéphane, 44 ans, et Emmanuel, 36 ans), ils dégagent un EBE sur produit en agriculture biologique de 70 % et prennent chaque année 11 semaines de congés par associé. Retour sur la visite du Gaec Lusanbio à Lusanger (44) avec trois groupes animés par la chambre d’agriculture.

Le Gaec produit tous les fourrages et concentrés sur l’exploitation. Après plusieurs années en conduite "100 % herbe", les associés ont choisi de réintroduire des cultures pour améliorer la sécurité fourragère, les rotations (éviter de ressemer de l’herbe après un retournement de prairie, ce qui pénalise le trèfle), et optimiser le lait produit par vache.

Produire un lait 100 % autonome à 6 000 l/VL

La mise à l’herbe a lieu au 1er février. Lorsque la part d’herbe pâturée atteint 70-80 % de la ration, les vaches reçoivent 3,5 kg de maïs fourrage pour "valoriser l’excédent d’azote de l’herbe", précise Yannick Allard.

À partir du 1er juin, le pâturage ne représente plus que 3 à 6 kg pâturés MS/VL/j dans la ration des vaches laitières. Colza fourrager, ensilages d’herbe (luzerne, RGH-TV, RGA-TB…), ensilage de méteil, foin ou parfois l’affouragement en vert viennent alors compléter la ration. À cela s’ajoute un concentré de production "maison" à base de méteil grain à 15 % de MAT (pois protéagineux, féverole, triticale, avoine). Le pâturage prend fin au 15 décembre.

Aucune complémentation minérale n’est réalisée, excepté un peu de chlorure de magnésium et un bloc à lécher pour les vaches au tarissement. Cette ration permet de livrer 6 000 l/VL/an.

Le troupeau, initialement en Prim'Holstein, a été croisé avec les races Jersiais, Montbéliard et Simmental.


Autonomie sur les semences des cultures annuelles

Pour maîtriser le coût de production des fourrages, le Gaec autoproduit ses semences de méteil (pois, féverole, orge), exception faite pour la vesce qui n’est présente que dans les mélanges ensilés.

Depuis 2017, les semences de maïs fourrage sont autoproduites. La semence provient à l’origine d’un voisin qui a fait un travail de sélection pendant 5 ans pour obtenir un maïs adapté aux conditions pédoclimatiques du secteur. 20 ares sont nécessaires à la production de semences pour l’année suivante : 150 épis récoltés à la main serviront à semer 10 ha. Les plus beaux maïs sont sélectionnés pour le renouvellement (taille des épis, 16 rangées de grain minimum sur l’épi), puis sont égrainés, triés pour conserver les gros grains (permet d’assurer les réserves de la culture en début de cycle). La dose semée à l’hectare est déterminée par un test de germination réalisé en mars.


Simplifier les récoltes, le stockage et la distribution des ensilages

Sur l’année, les associés réalisent deux principaux chantiers d’ensilage d’herbe (d’environ 30 ha chacun) et un chantier d’ensilage de méteil (6 ha). Les excédents d’herbe sont récoltés en foin ou en enrubannage. Un seul silo sandwich regroupe les chantiers d’ensilages d’herbe et de méteil, pour simplifier la distribution des fourrages.

Les ensilages d’herbe et de méteil ont une valeur moyenne de 15 à 17 % de MAT. Pour assurer un produit de qualité, la priorité est donnée au stade végétatif et non aux conditions météo. Les ensilages d’herbe sont fauchés à plat avec un fanage dans les 3 heures qui suivent. Les éleveurs visent un taux de matière sèche autour de 40-50 % au silo. "C’est un taux de matière sèche élevé mais pour des raisons de santé animale, nous préférons un fourrage assez sec. L’optimum c’est le foin de séchage en grange mais le coût économique et environnemental du séchage ne nous convient pas", expose Yannick Allard. Attention pour une bonne conservation, le tassement du silo doit être irréprochable ! Par ailleurs, aucun conservateur n’est utilisé.


Un troupeau aux gabarits et aux couleurs panachés

Les éleveurs ont choisi de croiser leurs Prim’Holstein pour améliorer la productivité (matière utile/VL), la santé et la fertilité du troupeau. Aujourd’hui, le schéma de croisement n’est pas figé, les éleveurs ne souhaitent plus inséminer en Prim’Holstein et alternent selon les caractères morphologiques de la vache et la race des parents entre Jersiais, Montbéliard et Simmental.

Avec un taux de renouvellement du troupeau de 15-20 %, le nombre de génisses à élever est limité. Seules les génisses et quelques vaches en première année de lactation sont inséminées en semences sexées avec un taureau laitier, les autres sont inséminées en Bleu Blanc Belge ou mises au taureau. Ainsi chaque année, sur les 35 IA entre 16 et 22 génisses sont gardées pour renouveler le troupeau. Les vaches font en moyenne 10 lactations.


Repères et chiffres clés

  • Agriculture biologique depuis 1994
  • 3,3 UTH dont 0,3 apprenti
  • 192 ha dont 63 ha accessibles et 55 ha pâturées par les VL
  • 660 000 l vendus en 2017
  • 110 VL à 6 000 l
  • Vaches croisées P. Holstein x Simmental x Jersiais x Montbéliarde
  • TB : 45,8 g/kg et TP : 33,8 g/kg
  • Taux de renouvellement 15-20 %
  • Vêlage 29 mois
La parcelle de maïs population récolté à la main. Une production testée pour la première fois en 2018 sur l'exploitation

Simplifier l’élevage des veaux

Suite à des problèmes sanitaires sur les veaux, les éleveurs ont choisi d’élever les veaux sous la mère. Plutôt que d’investir dans des niches à veaux à l’extérieur, ils ont préféré cette technique. Les veaux restent seuls avec leur mère pendant 3 jours afin que chacun identifie l’autre. Ensuite la vache et le veau entrent dans le troupeau, le veau reste ainsi sous la mère pendant 3 semaines. La vache nourrit donc son veau mais peut également passer à la traite. Passées 3 semaines, les lots de veaux sont séparés des mères puis nourris au milk-bar. Les petites génisses auront du foin et un mélange céréalier à base d’orge et de pois protéagineux aplatis en plus du lait. Tout est organisé afin que les veaux soient autonomes pour la tétée le vendredi, afin de ne pas occasionner une surcharge de travail pour l’associé d’astreinte le week-end.


La traite une semaine sur trois

Le travail sur l’exploitation est organisé selon un rythme de 3 semaines : chaque associé alterne 1 semaine de traite et soin aux veaux avec 2 semaines d’alimentation et autres activités sur l’exploitation. La semaine de traite comprend l’astreinte du week-end qui commence vendredi midi. Pour les horaires, c’est de 6h30 à 12h et de 14h à 18h45. Les horaires des autres semaines sont 8h à 12h et de 14h à 17h. La transmission des informations entre associés se fait le vendredi matin par un tour de l’élevage et le midi lors du pot de départ. À l’année, l’exploitation s’organise sur 2 périodes : de novembre à mars. L'hiver, chaque associé prend 1 semaine de congé après 1 semaine de traite, soit 7 semaines. L’été, les éleveurs prennent deux fois 15 jours de vacances.


Plus de 70 % d’EBE sur produit

Ce système permet de dégager 300 000 € d’EBE avant-main d’œuvre et dépenses financières soit plus de 70 % d’EBE sur produit et 450 €/1 000 l vendus avec un prix payé du lait à 495 €/1 000 l (45 € de plus-value TP et TB).


Les nouveaux défis : passer en sans labour, associer le haricot africain au maïs

Tous les ans, les éleveurs essaient quelque chose de nouveau sur l’exploitation. En 2018 par exemple, c’était la production de maïs population. Cette amélioration permanente vient de la volonté des éleveurs. Yannick nous confie : "Si je ne n’essayais pas de nouvelles choses constamment, je changerai de métier !". Ils souhaitent donc aujourd’hui aller vers le sans labour pour améliorer le stockage de carbone dans le sol et économiser du carburant. Le haricot africain ensilé en même temps que le maïs devrait améliorer la teneur en MAT de l’ensilage. Affaire à suivre !


Rejoignez-les !

Trois groupes d’éleveurs animés par les chambres d’agriculture ont rendu visite au Gaec Lusanbio : deux groupes sont financés dans le cadre du projet de territoire de la Haute-Rance (groupe de Caulnes et groupe du Méné), le troisième est financé dans le cadre d’un projet AEP (Agriculture écologiquement performante) sur le bassin versant du Haut-Couesnon. Ces trois groupes travaillent sur l’autonomie en protéines par les fourrages.

Pour les rejoindre, contacter Guénaëlle Boudier : 02 23 48 26 83.


Annexes

Source

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